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Les multiples sentiers de Josué Peley

Revue de presse

Carl Tardif, Le Soleil, 20 juillet 2013

Josué Peley(Québec) Le logo promotionnel soulignant le 15e anniversaire des Capitales de Québec possède une double signification pour lui. Voilà maintenant 15 ans que ses parents ont quitté le Venezuela avec leurs trois fils pour s'établir en permanence au Québec. Une décision que le joueur aux multiples fonctions comprend mieux, aujourd'hui.

Photo ci-dessus : Athlète polyvalent, Josué Peley peut jouer à toutes les positions sur le losange, et pour ce faire, il utilise sa collection de gants multicolores. (Le Soleil, Erick Labbé)

Déraciné du confort de sa routine d'enfant de 10 ans, le petit Josué se retrouvait du jour au lendemain dans un environnement qu'il ne connaissait pas, son gant de baseball devenant son inséparable ami.

«Honnêtement, je capotais d'avoir à quitter mon pays, je ne comprenais pas la décision de mes parents qui, sans vivre dans la pauvreté ni la richesse, avaient tout là-bas, de bons jobs, une maison, une voiture, une famille nombreuse, etc. Ça m'a pris plusieurs années avant de réaliser qu'ils avaient fait un sacrifice de fou pour nous offrir ce qu'il y avait de meilleur», relate le numéro 12 sur un ton admiratif.

Oswaldo Peley et Deyanira Parra sont les parents d'Oswaldo, Josué et Joel, tous trois bien établis dans la société québécoise. D'abord venus au pays afin d'étudier au début des années 90, ils réalisaient leur rêve de vivre ici au tournant du millénaire, laissant derrière un pays qui allait se transformer sous l'égide du leader socialiste Hugo Chavez.

Josué Peley

Photo ci-dessus : Josué Peley entouré de ses parents, Deyanira Parra et Oswaldo Peley. (Photo : Le soleil, Carl Tardif)

«Ils ne sont pas partis à cause de lui, car il n'était pas encore à la tête du gouvernement à leur départ. Mais ils n'ont jamais voulu que nous y retournions. Avec Chavez et son successeur, tout a changé. Avant, on connaissait le Venezuela à cause d'Andrés Galarraga [l'ex-joueur des Expos], maintenant, c'est à cause de la politique. Je vais y aller, éventuellement, même si la parenté là-bas ne cesse de nous dire non, non non, vous êtes trop bien au Québec», raconte-t-il dans une entrevue sur le divan planté au milieu du vestiaire des Capitales.

Le hasard fait drôlement les choses, puisqu'il évolue dans la ville où sa mère a appris le français, elle qui a fréquenté l'Université Laval à son arrivée. C'est à Montréal, d'abord dans un logement de Parc-Extension, puis dans la maison actuelle de Pointe-aux-Trembles, que les Peley ont bâti leur nid familial.

«Chez nous, c'est le Venezuela. On parle espagnol, on mange des mets de là-bas. Mais dès qu'on sort de la maison, nous sommes des Québécois et Canadiens comme tout le monde. Moi, je considère qu'il faut s'adapter aux coutumes de vie du pays que l'on choisit de vivre et non pas le contraire», dit-il dans une référence aux accommodements raisonnables sans même qu'on aborde le sujet.

Polyglotte
Josué, dont l'accent aigu existe depuis toujours, a appris le français dans une classe d'immersion, terminant troisième de son groupe «parce que j'avais la chance de n'avoir personne qui parlait espagnol avec moi...»

En parallèle, il joue au baseball, même s'il trouve que les pratiques sont plus nombreuses que les matchs. Arrêt-court, il gravite dans l'élite de son âge. Il évolue avec les Ailes du Québec et se joint à l'équipe canadienne junior pendant deux ans puisqu'il détient la double nationalité vénézuélienne et canadienne. Cette aventure avec Baseball Canada sera le deuxième point tournant de sa vie.

À sa sortie du secondaire, le cégep ne l'attire pas contrairement à une offre du collège Seminole State, en Oklahoma. Il passera haut la main le test d'anglais d'admission... parce que c'est l'un de ses amis qui l'a fait à sa place.

«J'ai accepté d'y aller et de relever le défi même si je ne disais pas un mot d'anglais. Pour convaincre ma mère, je lui avais dit que je savais ce que c'était d'apprendre une nouvelle langue et que j'allais le refaire encore», dit celui qui maîtrise l'espagnol, le français et l'anglais à la perfection.

À la fin de son association de deux ans avec les Trojans, il est recruté par l'équipe de première division de l'université Texas Christian, mais sa sélection en 35e ronde par les Pirates de Pittsburgh mènera plutôt à la signature de son premier contrat professionnel.

Encore là, sa vie prenait une nouvelle direction!

Josué Peley

Photo ci-dessus : Comme plusieurs joueurs de la ligue Can-Am, Josué Peley vit encore dans l'espoir de recevoir un coup de fil du baseball affilié. (Photothèque Le Soleil, Erick Labbé)

Le touche-à-tout du losange
Repêché à l'origine comme arrêt-court, son parcours dans le baseball affilié s'est fait derrière le marbre. Mais avec les Capitales de Québec, il remplit le rôle d'homme à tout faire. Et il aime ça!

«J'ai tellement joué sur le banc dans les mineures, ça me prendrait un bras cassé pour m'empêcher d'être sur le terrain», dit-il en riant.

Dans les mois ayant suivi sa sélection en 2006 (il avait aussi été repêché en 25e ronde par Washington en 2005), les Pirates ont vu quelque chose en cet inter déjà nommé sur l'équipe d'étoiles de sa division collégiale. Ils lui soumettront une offre comme receveur.

«Si j'acceptais, ils me donnaient l'équivalent d'un choix de 7e à 10e ronde. Je me suis rendu au Vermont et j'ai signé mon contrat. Mais à la fin de ma première saison, j'avais mal aux jambes», dit-il à propos de ses débuts derrière le marbre en 2007.

Il passera trois saisons complètes dans les filiales des Pirates, où il développera une amitié avec quelques joueurs ayant atteint les majeures. Il est aussi un admirateur du talent brut qui habite Starling Marte, jeune voltigeur qu'il considère comme étant un frappeur naturel comme l'était Vladimir Guerrero et un meilleur voltigeur de centre qu'Andrew McCutchen, l'actuel patrouilleur central à Pittsburgh.

«Hybride» le leader
En mai 2010, Peley est échangé aux Red Sox en retour de Jonathan Van Every. Il passe d'une jeune organisation où l'on forme les espoirs de demain à un club établi où la liberté n'a pas préséance sur la victoire. Ceux-ci ne le considèrent pas comme un membre du groupe des joueurs latins et ils le surnommeront l'hybride, en raison de sa maîtrise de l'anglais et de l'espagnol.

«J'étais toujours celui qui traduisait, qui faisait le pont entre les entraîneurs et les joueurs. Les gérants me demandaient mon opinion, j'ai toujours été considéré comme un leader. On savait aussi que j'étais un Canadien, parce que j'étais le seul à regarder du hockey!»

Peley a passé une saison et demie dans la «Red Sox Nation». Il dit y avoir été bien traité, à l'exception peut-être de sa dernière campagne. Il y a connu ses deux meilleures campagnes offensives (,291 en 2010 à Lowell dans le A faible et ,276 en 2011 à Salem dans le A fort).

«J'ai été déçu sur le coup d'être libéré après le camp de 2012, mais je ne suis plus fâché. J'ai fait mon deuil, je comprends qu'il y a des choses que je ne peux pas contrôler», indique celui qui a notamment capté les offrandes de lanceurs des majeures, comme Jonathan Papelbon, Andrew Bailey et Daisuke Matsuzaka.

Ce qu'il maîtrise bien, c'est son attitude. Le joueur de 25 ans dégage la joie de vivre. Son plaisir, il le trouve sur un losange, peu importe la position qu'il occupe. À Québec, Peley peut faire ce qu'il aime le plus : jouer au baseball tous les jours.

«Nacc [Ivan Naccarata] m'avait appelé pour savoir si ça m'intéressait d'aller à Québec. J'ai parlé à Scal [le gérant Patrick Scalabrini] et je lui ai dit de me donner en salaire ce qu'il lui restait. Il était quasiment gêné, mais m'a dit de ne pas m'en faire pour l'an prochain... À mon premier match en 2012, j'étais frappeur désigné et je suis celui qui en a joué le plus [97 sur 100].»

Les couleurs de l'espoir
Comme plusieurs joueurs de la ligue Can-Am, Josué Peley vit encore dans l'espoir de recevoir un coup de fil du baseball affilié. «Mais si ça n'arrive pas, je ne serai pas déçu», avoue le sportif de 25 ans qui se verrait dans la peau d'un analyste de baseball à la télévision.

Cet hiver, il y a eu des discussions avec les Diamondbacks de l'Arizona, sauf que l'obtention d'un visa a freiné le projet. Si quelques joueurs du baseball indépendant ont eu leur chance, pourquoi ne l'obtiendrait-il pas à son tour?

«Quand je vois des gars comme Nick Giarraputo [White Sox] et Rony Rodriguez [Cubs] avoir eu leur chance, je pense avoir le droit d'en mériter une. On ne comprend pas pourquoi [je n'en ai pas]», se questionne-t-il.

Peley aimerait aussi vivre l'aventure de l'équipe nationale, comme l'a fait son coéquipier Jonathan Malo à la Classique mondiale.

«Selon Jo, il n'y a aucune raison pour que je ne sois pas avec l'équipe canadienne, surtout que je peux jouer partout. Michel [Laplante] et Patrick [Scalabrini] disent avoir rarement vu un joueur comme moi ne pas avoir une autre chance, c'est flatteur de leur part.»

Qu'importe, il donne tout ce qu'il a sur le terrain du Stade municipal et de ceux des autres villes de la ligue Can-Am. Sachant qu'il ne peut être accroupi à tous les jours, sa polyvalence lui permet de se rendre utile.

Et il le fait de façon flamboyante, à commencer par la couleur de ses gants de baseball et par son style. «J'aime sortir de l'ordinaire, j'ai du fun et je le démontre. Mais Patrick sait aussi que je ne mettrai jamais l'équipe dans le trouble!»

Des hommes d'influence
Tom Prince, Pirates
- (coordonnateur des receveurs)
«Il m'a tout montré de A à Z de la position de receveur. Il ne m'a pas donné de mauvaises habitudes et m'a toujours dit d'avoir une raison pour commander tel ou tel lancer. Il disait peut-être que je pouvais me tromper, mais que j'aurais une explication. Il a fait de moi un joueur encore plus complet, et surtout, m'a fait mieux comprendre la partie. Quand Russell [Martin] s'est retrouvé avec les Pirates, je lui ai demandé de le saluer et de le remercier pour moi, il l'a fait et se souvenait de moi.»

Russell Martin, Pirates (receveur)
«Depuis quelques années, j'ai la chance de m'entraîner avec lui pendant les saisons mortes. Russell, Ivan Naccarata et Jean-Luc Blaquière, on passe beaucoup de temps ensemble. L'entraînement de Russell est rigoureux, mais il aime qu'on soit avec lui. Il nous amène avec lui en Arizona, on profite aussi des conseils de son instructeur des frappeurs. On est membres à part entière de son groupe d'entraînement, comme Andre Ethier [Dodgers], Eric Chavez [D'Backs], etc. J'aurais tellement voulu avoir cette chance à 17 ou 18 ans, mais je l'apprécie quand même. Lorsque je me retrouve dans une mauvaise passe au bâton, je reviens à ce qu'on faisait là-bas ou j'envoie un message texte à Russell pour qu'il me conseille.»

Omar Vizquel, Indians (arrêt-court à la retraite)
«Lui, c'est mon idole d'enfance. Il rejoindra bientôt Luis Aparicio [lui aussi un ancien arrêt-court natif du Venezuela] au Temple de la renommée du baseball. Je l'ai déjà rencontré avant une pratique au bâton et il m'avait dit de revenir le voir après l'exercice. Je lui avais raconté mon cheminement, que je venais du Venezuela comme lui et il m'avait donné son bâton et ses gants de frappeurs. Je les ai encore.»

David Ortiz, Red Sox (frappeur de choix)
«David Ortiz, c'est le vétéran par excellence, il est encore mieux en personne de ce qu'on voit à la télévision. Un jour, Tom Prince m'a dit que le meilleur compliment qu'un espoir des mineures pouvait recevoir d'un joueur des majeures, c'était de se faire dire qu'on agissait en professionnel et il me l'a déjà dit. À l'inverse, on savait déjà au début du camp des Red Sox, en 2012, que Bobby Valentine ne serait pas le gérant des Red Sox bien longtemps.»

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

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