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Locution du jour : YOLO
Textes et recherches de Jacques Lanciault
Je consigne ici le fruit de recherches sur le sens, l’étymologie, l’écriture ou encore la prononciation de certains mots ou expressions sur lesquels je bute, ou qui tout simplement suscitent ma curiosité au fil de mes lectures...
Dimanche 26 janvier 2014
Source de la recherche :
Le paragraphe suivant, tiré d’un texte d'Édouard Nasri, publié dans le quotidien Le Devoir du 19 janvier 2014 sous le titre YOLO : le carpe diem des temps modernes? Contraste et rapprochement entre la devise de Drake et la locution d’Horace
«YOLO. C’est en écrivant ces quatre lettres au tableau que j’ai amorcé mon cours de "Philosophie et rationalité" l’automne dernier. Je n’avais pas encore terminé de le faire que des éclats de rire se sont fait entendre (mais aussi quelques "Oh non, pas ça!").
Popularisée par le rappeur et chanteur canadien Drake en 2011, dans sa chanson The Motto ("La devise"), l’expression YOLO fait fureur chez beaucoup de jeunes, quoiqu’elle en rebute pas mal d’autres qui en sont déjà au stade de l’overdose. Mais une chose est sûre : une large majorité la connaît et elle ne laisse pas indifférent.
On la retrouve sous diverses formes : à l’oral (sous forme d’interjection), à l’écrit (sur les réseaux sociaux tels que YouTube, Facebook et Twitter), imprimée sur des vêtements et des casquettes (c’est donc également une opération marketing plutôt juteuse : l’an dernier, Drake a demandé des redevances à deux magasins qui utilisent "son" expression).
L’acteur américain Zac Efron se l’est même fait tatouer sur la main et d’autres quidams ont suivi son exemple ! Mais au fait, ça veut dire quoi, YOLO ?
YOLO est l’acronyme de la phrase anglaise "You only live once". Traduction : "On ne vit qu’une fois." Lorsque j’ai demandé à mes étudiants d’expliquer le sens de cette expression, des réponses telles que "il faut oser prendre des risques", "on doit profiter de la vie sans penser aux conséquences", "il faut se faire plaisir !", mais aussi "faire n’importe quoi", ont été lancées.»
Définition :
Un texte publié dans la revue L’actualité du 11 mars 2013, sous la signature de Julie Barlow, explique en détail l’expression YOLO :
Êtes-vous YOLO ?
Julie Barlow, L’actualité, le 11 mars 2013
« Rares sont les jeunes anglophones qui ne reçoivent pas, au moins une fois par jour, un texto se terminant par « YOLO ».
YOLO ? C’est l’acronyme de You only live once (on n’a qu’une vie). Le rappeur canadien Drake (nom de scène d’Aubrey Drake Graham) l’a formulé dans sa chanson « The Motto », sur l’album Take Care, en 2011 : « You only live once : that’s the motto, nigga, YOLO » (on ne vit qu’une fois : c’est la devise, nèg’, YOLO).
Cette expression est devenue virale un an plus tard, après que l’acteur Zac Efron, vedette du film High School Musical, se l’est fait tatouer sur le poignet. En avril 2012, la journaliste Maura Judkis l’a utilisée dans le Washington Post : « Nous vivons dans un état de YOLO ! » En février, la chaîne française W9 a même lancé une téléréalité intitulée YOLO : On ne vit qu’une fois.
L’acronyme a eu une forte résonance auprès des jeunes. Il exprime un mélange de rébellion, de témérité et d’insouciance mâtiné d’un esprit de fête, voire de débauche. « On l’emploie quand on sait qu’on est en train de faire une bêtise », explique ma nièce Ceilidh Barlow-Cash, 19 ans, étudiante à l’Université de Guelph, en Ontario. « Comme quand on sort faire la foire avant un examen important. »
L’expression « You only live once » n’est pas nouvelle. Formulée pour la première fois par Samuel Richardson dans son roman épistolaire Clarissa (publié en 1748), elle a été reprise dans une chanson de Frank Sinatra ainsi que dans un film de la série James Bond : You Only Live Twice (On ne vit que deux fois).
Ce qui est nouveau, c’est l’acronyme, qui est en voie de devenir très courant dans la culture texto, comme d’autres créations – OMG (oh, my God !, oh, mon Dieu !) et LOL (laughing out loud, je ris à voix haute), qui ont aussi pénétré d’autres langues que l’anglais. « On ne prononce pas souvent le mot », explique ma nièce Ceilidh. En effet, YOLO apparaît surtout sous la forme #YOLO, car il sert souvent de mot-clic dans les réseaux sociaux. Il agit donc comme une sorte de marqueur qui permet aux utilisateurs de se rassembler autour d’un concept.
Tout cela a-t-il un sens ? On en débat. Si le prestigieux Oxford American Dictionary considère cet acronyme comme une innovation linguistique déplorable, le Washington Post le qualifie de « carpe diem de la génération Y », par allusion à l’aphorisme latin qui signifie « mets à profit le jour présent ». Certains parlent de « cri du cœur des jeunes ».
La toile de fond de ce débat est un autre courant sociologique, qui consiste à étiqueter chaque décennie ou chaque génération. Il y a eu les années folles (années 1920), la génération perdue (de l’entre-deux-guerres), la génération grandiose (qui a fait la Deuxième Guerre mondiale). En 1991, l’historien William Strauss et l’économiste Neil Howe publiaient Generations, livre qui fondait la théorie selon laquelle chaque génération porte des valeurs particulières, voire son archétype : les baby-boomers (la génération du moi), la génération X (les fainéants). En 2000, ils ont consacré un autre ouvrage à la « génération du millénaire », nommée la génération Y par la suite, qu’ils décrivent comme plutôt engagée et optimiste.
Si l’attitude YOLO ne colle pas tout à fait au portrait qu’en brossent Strauss et Howe, c’est à cause de la récession de 2008, que personne n’a vue venir et qui a refroidi les plus optimistes. « Les gens de mon âge sont convaincus qu’il n’y aura pas d’emplois pour nous », dit ma nièce.
YOLO est-il l’étiquette d’une nouvelle génération ou une mode passagère ? La publicité s’en est déjà emparée pour vendre des t-shirts, des berceuses « tendance » et même de l’assurance vie ! S’insurgeant contre cette récupération, Drake aimerait bien qu’on le paie pour sa «marque». Après tout, on ne vit qu’une fois!
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