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Les Expos m’ont fait beaucoup de peine

Revue de presse

Propos de Pierrre-Luc Laforest recueillis par Robert Latendresse, RDS.CA, le 19 juillet 2011

Pierre-Luc Laforest Chers internautes, c'est avec plaisir que je me joins au RDS.ca à titre de collaborateur expert. Toutes les deux semaines, vous pourrez lire mes réflexions sur les Capitales de Québec et sur la Ligue Can Am. Pour cette première chronique, je vais vous parler du cheminement qui m'a guidé jusqu'au baseball professionnel et de la première moitié de saison de mon équipe.

Photo ci-dessus : Pierre-Luc Laforest lors d'un match à Ottawa alors qu'il portait les couleurs des Bulls de Durham de la Ligue Internationale (AAA).

Mon association avec le baseball professionnel a débuté en 1995 alors que les Expos de Montréal m'ont repêché en 16e ronde. Malheureusement, mon affiliation avec Nos Amours a été de très courte durée. En fait, ç’a été 18 petits jours. Je vais vous expliquer pourquoi.

Après avoir signé un contrat avec les Expos, on m'a demandé de subir un examen de santé où un test d'imagerie à résonnance magnétique a révélé que j'avais cinq subluxations dans le dos. J'avais bien des raideurs au dos, comme tous ceux qui jouent au baseball sur une base quotidienne, mais sans plus. Je n'avais que 17 ans à l'époque. Le directeur des ligues mineures m'a dit qu'il me conseillait fortement, de retourner à l'école pour reprendre mes études et d'abandonner le baseball. Il disait que ma blessure au dos pouvait empirer et je pouvais en payer le prix plus tard.

C'est incroyable la peine que j'avais parce que la journée de mon repêchage, c'était la plus belle journée de ma vie. J'étais jeune et les moyens de communication n'étaient pas ce qu'ils sont aujourd'hui. À l'époque, je ne connaissais que les Expos et les Blue Jays de Toronto. Mon équipe toutefois, c'était les Expos. Pendant une semaine, je ne portais plus à terre. Mais ce renvoi m'a détruit. J'étais tellement déçu. J'ai tellement pleuré, moi qui avais fait tellement de sacrifices à partir de 15 ans pour me donner de meilleures chances de réussir en quittant mon Ouataouais natal pour déménager dans la région de Montréal.

J'ai vraiment cru que c'était fini alors que ça ne venait que de commencer. On venait de détruire mon rêve, mais ma persévérance était intacte et j'ai travaillé plus fort pour prouver aux Expos qu'ils se trompaient. Je voulais simplement une deuxième chance.

Alors 18 jours après la signature de mon contrat, les Expos ont simplement annulé l'entente. Je me retrouvais sans rien après avoir été repêché par l'équipe de mon enfance. Je n'avais pas l'intention de tout abandonner. J'ai donc pris la route de St-Eustache dans la Ligue baseball élite du Québec. Entretemps, j'ai rencontré des spécialistes et j'ai subi de nombreux tests pour me faire dire que je n'avais rien au dos. En 1996, je me suis retrouvé avec l'équipe du Canada. On avait notamment participé à un tournoi au Missouri où j'avais d'ailleurs été nommé joueur par excellence de mon équipe.

J'avais choisi de retourner au collège. On m'avait offert une bourse d'études complète à Clemson. J'étais content parce que je pouvais obtenir un diplôme, mais un mois avant que je parte pour l'école, la NCAA m'a fait savoir que je n'étais pas admissible à la bourse d'études parce que j'avais supposément signé un contrat une équipe professionnelle et que j'avais touché de l'argent. La réalité était que j'avais passé 18 jours avec les Expos et que je n'avais pas eu de boni de signature. Au plus, j'avais eu droit à un billet d'avion pour me rendre au camp et un chèque de 100 dollars. Mes arguments n'ont pas fonctionné et j'ai dû prendre une autre avenue. C'est ainsi que j'ai atterri à Fort Scott au Kansas où je me suis retrouvé avec Steve Green.

Trois équipes à mes trousses
Après une première très bonne saison à Fort Scott, trois équipes m'ont offert un contrat. Il y a eu Kansas City, les Marlins de la Floride et les Devil Rays de Tampa. En 1997, j'ai reçu trois offres identiques de 25 000 dollars. Je me souviens d'avoir dit au recruteur des Devil Rays que tous les clubs m'offraient la même chose. Le gars m'a simplement demandé combien je voulais. Après réflexion, j'ai demandé 40 000 dollars, qu'il a accepté sur le champ. Après coup, je me trouvais un peu trop rapide en affaire parce que j'aurais pu essayer de demander un peu plus. La pire chose qu'il aurait pu me dire, c'est non.

Inutile de dire que j'étais très heureux. Je n'ai même pas retourné les appels des Royals et des Marlins. J'ai téléphoné à mes parents et j'ai laissé un message sur leur répondeur. "Je suis plus riche de 40 000 dollars parce que je viens de signer avec les Devil Ras. Je m'en vais chez les professionnels."

Mais, l'argent n'était pas ma principale source de motivation. Tampa était une nouvelle organisation et après discussions, j'ai compris que l'équipe avait besoin de joueurs pour son réseau de filiales et que j'allais avoir la chance de jouer.

Après une saison dans les ligues mineures, j'ai eu des ennuis avec mon visa de travail parce que j'avais déclaré que j'allais étudier aux États-Unis et non jouer au baseball. C'était de la faute à l'équipe et ça m'a fait perdre huit mois. Par la suite, je devais faire une demande de visa tous les ans.

Le jour "J"
On ne peut pas oublier la journée où on t'annonce ton rappel. Surtout qu'il s'est écoulé six ans entre le moment où j'ai signé avec l'équipe et le moment où j'ai finalement joué.

J'étais receveur régulier dans le AAA, mais je traversais une période creuse. En arrivant au stade, mon nom n'était pas sur l'alignement et je suis allé questionner le gérant, qui m'a demandé de m'asseoir parce qu'il voulait me parler. Il m'a demandé si j'avais une idée pourquoi je ne jouais pas. J'ai répondu que je ne savais pas. Il m'a alors annoncé qu'on annoncerait après la partie que j'étais rappelé par les Devil Rays, mais que je devais n'en parler à personne.

Ce fut la partie la plus longue de ma vie. En plus, je ne jouais pas. J'étais sur le banc et j'explosais de joie à l'intérieur. C'était étrange parce que mon équipe avait subi la défaite, mais moi j'étais tellement heureux. Je ne savais pas plus comment agir. Après la partie, j'en ai parlé à quelques coéquipiers et tout le monde est venu me féliciter.

Après la partie, j'ai téléphoné à mes parents (Céline Laforest et Carol Dagenais). Ils étaient tellement émus. Les deux pleuraient, tellement ils étaient contents. Je dirais que mes parents ont fait autant d'efforts et de sacrifices que moi pour que je réussisse. Ils m'ont toujours appuyé. Quand ça allait mal, ils étaient toujours là. Ils ne m'ont jamais poussé. Ils ne faisaient que me réconforter. Sans eux, je ne serais pas là où je suis actuellement.

Lors de ma première campagne avec les Devil Rays, j'étais surtout frappeur désigné, mais lors de mon premier match, j'étais receveur. J'ai obtenu mon premier coup sûr contre Joel Piniero des Mariners de Seattle.

J'avais obtenu deux coups sûrs en six. Mon premier coup sûr est passé par-dessus la tête de John Olerud et je pensais pouvoir obtenir un double. Après avoir contourné le premier but, j'ai appliqué les freins parce que Ichiro a lancé un plomb au deuxième. Si j'avais décidé d'y aller pour un double, j'aurais été retiré par dix pieds minimum. Je me souviens que Olerud m'avait félicité en me disait à la blague qu'il m'en manquait 2 999 pour atteindre le cap des 3 000.

Mon premier circuit
J'ai frappé deux circuits dans le baseball majeur. Mon premier était à Tampa contre Paul Byrd des Indians de Cleveland. J'étais heureux de briser la glace, mais ce n'était pas là mon plus beau moment. Depuis ma tendre enfance, je jouais tous les jours alors que là, je ne jouais qu'une fois ou deux par semaine. Ce n'était pas facile.

Dans ma tête, ce n'était qu'un circuit. Dans mon esprit, mon premier match et mon premier coup sûr ont été plus importants.

J'ai été chanceux d'avoir pu récupérer la balle qui est revenue sur le terrain après avoir franchi la clôture.

Les Padres et les Phillies
J'ai été réclamé au ballottage par les Padres de San Diego en 2007. À la fin du camp d'entraînement, le gérant Bruce Bochy m'a dit que l'équipe était fière de moi et que j'allais être cédé aux ligues mineures parce que le club voulait garder un lanceur de plus, le temps que les partants trouvent leur rythme en début de saison. L'idée de Bochy était d'avoir trois receveurs dans la formation. Alors, je devais m'attendre à un rappel une dizaine de jours après le début de la saison. On voulait m'utiliser en fin de match par mesure défensive. Cette saison-là, les Padres avaient aussi Mike Piazza et Doug Mirabelli comme receveur.

En soirée, Bochy m'a demandé d'aller au bâton comme frappeur suppléant et sur un élan, je me suis déchiré une hernie une fois de plus et j'ai raté toute la saison.

La saison suivante, je suis retourné avec les Padres. J'ai eu un très bon camp d'entraînement, mais j'ai été cédé au niveau AAA. J'étais en lutte avec Rob Bowen pour le poste d'auxiliaire à Josh Bard. J'étais déçu parce que je venais de connaître mon meilleur camp. Je trouvais la situation injuste.

Quand Bard s'est blessé, je suis revenu avec les Padres et j'alternais de match en match avec Bowen. Je voulais prouver à l'équipe que j'étais meilleur que lui. Les choses allaient bien. J'étais même derrière le marbre lors d'un match de 16 retraits au bâton de Jake Peavy. J'étais aussi derrière le marbre quand David Wells était passé proche d'un match parfait. Wells m'a même dit qu'il voulait que je sois son receveur et qu'il allait en parler au gérant Bud Black. Malheureusement, ce fut mon dernier match avec les Padres.

Le 31 août mon nom a été placé au ballottage parce que les Padres voulaient un lanceur de plus dans la rotation en prévision des séries. Ils ne pensaient pas que je serais réclamé, mais les Phillies de Philadelphie en ont décidé autrement. Avec les Phillies, j'étais simplement un frappeur suppléant en fin de partie, une situation qui était nouvelle pour moi.

J'ai adoré jouer pour deux équipes de première place où les ambiances étaient totalement différentes. J'ai tellement appris avec ces deux clubs.

J'ai signé un nouveau contrat avec les Phillies en 2008, mais j'ai été blessé au bras. En 2009 alors que j'étais avec les Marlins, mon épaule n'a pas voulu collaborer et j'ai été libéré.

Les Capitales
Après un séjour en Arizona et au Mexique, je me suis joint aux Capitales de Québec. En 2009, je voulais prouver à tous que mon épaule était complètement rétablie d'une opération. Je pense que j'ai réussi à prouver que je pouvais toujours lancer.

Par la suite, je me suis rendu au Japon en compagnie de Cecil Fielder, Eddie Lantigua et d'un Japonais dans l'espoir de trouver du boulot. On allait dans les parcs et on frappait des balles devant les équipes pour essayer de décrocher un contrat. J'ai presque réussi à obtenir un contrat, mais je me suis étiré un muscle encore une fois.

Je voulais me faire remarquer, c'est pour cette raison que je suis allé dans la Ligue Atlantique pour espérer revenir éventuellement dans le baseball affilié. J'ai obtenu un contrat à Taiwan, mais sans jamais jouer dans l'équipe principale.

J'ai donc décidé de retourner dans le baseball indépendant. Je voulais jouer à un endroit où je serais heureux. Québec était donc l'endroit tout désigné.

J'ai fait une croix sur le baseball majeur ou sur le baseball affilié. Si un jour j'y retourne, ce sera comme instructeur. Je peux me regarder dans le miroir et me dire que j'ai tout donné. Je suis heureux à Québec où moi et ma femme, on attend l'arrivée d'un enfant d'ici trois semaines.

Quelle saison
Les Capitales sont les champions en titre de la Ligue Can Am. Nous avons aussi remporté le championnat de la première saison en 2011, parce que dans cette ligue, la saison est divisée en deux et on y couronne deux champions qui s'affrontent en séries.

Nos succès reposent sur l'effort de tous. Nos lanceurs sont dominants. Tout le monde sait qu'au baseball, tu ne gagnes pas si tu n'as pas de bons lanceurs. On s'est bâti une équipe avec une très bonne défensive et un enclos de relève solide. On savait que nos partants comme Matthew Rusch, Karl Gélinas et Dan Sauseville étaient bons. Il y en avait toutefois deux autres artilleurs dont on n'était pas convaincu. Le principal point d'interrogation était en relève parce qu'on ne connaissait personne. On a été chanceux, car nos releveurs ont fait un travail colossal. Notre receveur Patrick D'Aoust dirige nos lanceurs de façon remarquable. Pat prend les choses personnelles. Quand un lanceur perd, il perd lui aussi.

Ma philosophie est de jouer selon le livre du baseball. La seule chose qui peut baisser au bâton, c'est la moyenne alors que les points produits vont toujours monter. Il faut se concentrer là-dessus. C'est avec les petites choses qu'on fait marquer des points. C'est ce que j'ai appris avec les Devil Rays. D'ailleurs avec les Capitales, c'est un joueur différent qui nous fait gagner à chaque match. Nous avons deux joueurs qui frappent au-dessus de ,300. Pour le reste, tout le monde contribue. Au monticule, on sait que nos lanceurs vont toujours nous donner une chance de gagner chacun des matchs.

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault, collaborateur.

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