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Caravaggio au Musée des beaux-arts du Canada – Une exposition unique sur le maître du clair-obscur
Revue de presse
Isabelle Paré, Le Devoir, le 9 février 2011
Le Musée des beaux-arts du Canada (MBAC) accueillera en juin prochain la première exposition à être consacrée au maître italien du clair-obscur et du réalisme cru au pays. Avec Caravaggio et les peintres caravagesques à Rome, la capitale nationale déploie le deuxième corpus d'œuvres par son importance du Caravage et consorts à être présenté en Amérique du Nord depuis 40 ans.
Photo ci-dessus : Simon Vouet, La Diseuse de bonne aventure, v. 1620 (Huile sur toile, 120 x 170,2). Le peintre français étudia avec passion Caravaggio.
Photos ci-dessous : Nous devons au Caravage deux toiles intitulées « Diseuse de bonne aventure ». La première ci-dessous est conservée au Musée du Louvre à Paris, alors que la deuxième peut être admirée au Musée du Capitole à Rome.
Cette exposition dédiée à Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit Le Caravage, et à tous ceux qui marchèrent dans ses pas, survient au terme de quatre ans d'intenses négociations menées auprès d'un réseau de musées à travers l'Europe et l'Amérique pour mettre la main sur ces toiles convoitées. Le 400e anniversaire de la mort du peintre en 2010, la découverte de sa dépouille à Porto Ercole en Italie et une exposition majeure tenue à Rome l'an dernier ont propulsé à l'avant-plan l'artiste longtemps honni par ses contemporains.
«Il s'agira d'une chance unique pour les visiteurs d'entrer en contact avec le génie contagieux du grand maître», a affirmé hier Marc Cayer, directeur du MBAC, de passage à Montréal pour dévoiler la programmation 2011-2012 du musée d'Ottawa.
Une alliance avec le Musée de Fort Worth au Texas, détenteur de plusieurs toiles du maître, et l'échange d'un Rembrandt et de plusieurs Laurenzo Lotto de la collection du MBAC, ont permis de faire converger dix toiles du Caravage vers la capitale nationale.
«Les peintures du Caravage sont rares. Pas plus de 70 sont recensées dans le monde, et la plupart sont situées dans des palais ou des églises en Italie. Nous sommes très fiers de pouvoir présenter le deuxième plus grand corpus d'oeuvres jamais présenté en Amérique du Nord», a affirmé Sebastian Schütze, commissaire invité de l'exposition et professeur d'histoire de l'art à l'Université de Vienne.
Une cinquantaine de toiles de peintres français, allemands, flamands, italiens et espagnols, dont le pinceau s'est directement inspiré des thèmes et techniques propres au maître, mettront en lumière l'influence de ce génie sur la peinture du XVIIe siècle. Des toiles des Italiens Bartolomeo Cavarozzi, Orazio et Artemisia Gentileschi, du Hollandais Gerrit Van Honthorts et des Français Simon Vouet et Valentin de Boulogne viendront éclairer l'héritage laissé par ce mentor controversé. «À l'époque, plusieurs peintres sont venus d'Allemagne, de Hollande et de France pour étudier la technique du Caravage même s'il n'avait pas d'école à proprement parler», explique M. Schütze.
Mort à 49 ans dans la pauvreté et la disgrâce, Caravaggio n'a vu son art vraiment reconnu qu'au XXe siècle. Son style naturaliste, considéré brutal et subversif, fut longtemps répudié par l'Église et les mécènes. Sa représentation théâtrale et violente de thèmes religieux, dont la décapitation, lui attira de nombreux ennuis. Son oeuvre fut aussi associée à sa vie dissolue, marquée par de constantes bagarres, un meurtre et une fuite pour échapper à la justice.
Après sa mort, on redécouvrira la puissance de son style délinquant, nimbé d'érotisme et d'une technique du clair-obscur unique, qui inspirera plus tard Rembrandt, Rubens, Poussin et plusieurs générations de peintres. Un style percutant qui, à n'en pas douter, marqua à jamais l'évolution de l'art pictural.
Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.
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