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Jan/07
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Les jeux sont faits. Rien ne va plus!

C'est fier des écrits de ma soeur Louise que je publie aujourd’hui le troisième d'une série de ses textes forts émotifs portant sur les difficiles combats qu’engendre un diagnostic de maladie grave chez un proche. Un amalgame de mots qui font réfléchir, ça c’est certain! - Jacques Lanciault

Texte de Louise Lanciault

Deux jours, 29 et 30 avril 2006. Une fin de semaine d’angoisse extrême. Des moments si intenses qu’ils demeurent inoubliables malgré le passage du temps : des nœuds dans le ventre, des larmes sur les joues, des sanglots qui éclatent sans retenue. La vie vient de prendre un tel virage, nous en sommes pantois.

Demain, au petit matin, nous prendrons le chemin de l’hôpital. Pierre se fait opérer pour un cancer. Il passera sous le bistouri avec tout ce que cela implique de risques, de conséquence… C’est vraiment un acte de foi. Il faut s’abandonner sous les mains habiles d’inconnus et d’instruments froids qui tripotent les entrailles dans l’espoir de guérir.

Un face à face avec le destin. Seuls dans cette aventure, étrangers en ces lieux inconnus.

Il faut faire face à la musique; on se présente donc la tête haute, les yeux rougis et les jambes molles. On a peur. Une peur si profonde qu’elle prend toute la place.

On se sent si démunis, si vulnérables, à la merci de tout ce qu’on peut imaginer…même le pire.

La mort rôde entre nos deux oreilles. Comment ne pas y penser? La naissance à un bout et la mort à l’autre bout. Voilà la vie résumée à sa plus simple expression. Je capote… un peu plus et je vais me mettre à croire en Dieu.

Pierre a revêtu la « jaquette » d’hôpital. Ils lui ont mis un bonnet sur la tête et des espèces de pantoufles en plastique aux pieds. Il porte ses bas blancs élastiques pour éviter les phlébites. Il est « crotte » comme ça ne se peut pas. Il a revêtu son costume de malade, mais le hic c’est qu’il n’y a pas de mascarade. Pas de doute, nous sommes dans la réalité bien loin de la fiction.

Malgré tout, on rit de bon cœur, mais de ces espèces de fous rires nerveux qui contrastent avec la sévérité des lieux. Pierre et moi nous rions souvent dans les églises, dans les salons mortuaires, enfin dans tous ces endroits où il ne faut pas. Fidèles à nos habitudes, nous rions donc de bon cœur en ces moments solennels.

Un infirmier enlève les lunettes de Pierre et me demande de me retirer. L’heure est venue. J’embrasse Pierre et j’éclate. Voilà que je craque, je tremble de tous mes membres. Le Roc de Gibraltar, comme m’appelle Pierre vient de s’écrouler…

Entre deux sanglots et le bruit des roulettes du lit qu’on déplace, j’entends Pierre me dire : « Ça ira bien ma loulou, à tantôt, je t’aime. »

Mon « je t’aime » à moi s’étouffe dans le fond de ma gorge. J’entends la porte de la salle d’op claquée. Pierre est décidément entre d’autres mains…

À suivre…

Remplis sous: Textes de LouLou Mots clés:
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