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Revue de presse : Flâner à Séville en automne

David Homel, collaboration spéciale, La Presse, cahier Vacances Voyage, samedi 18 novembre 2006

Une vue du sous-bois dans le parc Maria Luisa à Séville en Espagne.

L'automne est la meilleure saison pour visiter Séville, en Andalousie, dans le sud de l'Espagne. L'été, c'est bien connu, on fait la queue sous un soleil écrasant pour visiter les monuments principaux. Dans l'entre-saison, la vie culturelle de Séville est plus intense, avec son festival de film et la fête de Womex, le marché du World Music, qui y a élu domicile.

Photo de Jacques Lanciault, une vue du sous-bois dans le parc Maria Luisa à Séville en Espagne. L'été, à Séville, on fait la queue sous un soleil écrasant pour visiter les jardins et les monuments principaux. L'automne s'avère la meilleure saison pour visiter la ville.

N. B. — Pour agrandir la photo, il suffit de cliquer sur celle-ci.

Je n'ai qu'un conseil. Si, en flânant dans les rues, vous croisez un bar qui vous semble digne d'intérêt, n'attendez pas demain pour y entrer. Il ne sera peut-être plus là. Séville, c'est le lieu des bars éphémères. Pendant plusieurs nuits, rue Arfe dans le quartier de l'Arenal, la musique et des éclats de voix joyeuses sortaient de la Casa Matias jusqu'aux petites heures.

Un soir, l'auvent de métal est tombé, et la Casa Matias a disparu sans laisser de trace. Et quoi dire de ce bodega, rue Cristóbal de Castillejo, dans le même quartier, avec ses énormes barriques de vin et son " auto-servicio de jamón " (jambon self-service)? Ouvert un soir, rempli à craquer de clients qui dégustaient le vin de Jérez, ensuite fermé à jamais.

Même son de cloche chez les vendeurs de poisson frit à emporter, comme celui de la rue Harinas. Un commerce qui attire des flâneurs plutôt nocturnes. Ceux qui font la friture vont aussi se promener, après leur quart de travail.

Plusieurs lieux ont toutefois une vie plus stable. Dans le quartier de Santa Cruz, plus touristique que l'Arenal, le café Las Teresas (dans la rue Santa Teresa, bien sûr) offre des sièges accueillants. C'est important pour le flâneur, car la majorité des bars et des cafés obligent leurs clients à rester debout, ce qu'ils font sans s'en plaindre. À Las Teresas, comme ailleurs, le jambon est roi, et le décor du café est agrémenté de lourdes cuisses de cochon qui pendent du plafond. Chaque jambon est assorti d'un collecteur, une sorte de petit parapluie jaune en plastique inversé, destiné à recueillir le gras qui coule de la viande.

Les vrais amateurs de jambon se rendent au Mesón Cinco Jotas dans la rue Arfe - la maison des cinq J, la classification supérieure du jambon. Ils le dégustent sous un éclairage cru. Si vous voulez voir le jambon sur pied, faites une petite virée vers les basses montagnes de la Sierre Norte, au nord de la ville, vers El Pedroso, par exemple. Vous risquerez de voir des troupeaux entiers de cochons ibériques, la race propre à la région, en train de manger des glands sous les chênes. À El Pedroso, le restaurant Los Alamos offre une excellente cuisine des montagnes. C'est là, dictionnaire à la main, que j'ai appris que le sanglier, en espagnol, se dit jabalí.

La plupart des visiteurs se contentent du quartier Santa Cruz, et ils n'ont pas forcément tort. Le coin prend son nom d'une petite place bâtie autour d'une croix fantaisiste avec des monstres et des prédicateurs sculptés dans le fer. Derrière la place se trouvent les Jardines de Murillo, nommés en l'honneur du peintre (ses meilleurs tableaux sont à l'Hospital de la Caridad), où on peut flâner tranquille, entouré des fontaines de faïence, sans avoir à payer le prix pour entrer dans l'Alcázar, la vieille forteresse arabe, qui a aussi de beaux jardins.

Un des joyaux de Santa Cruz est sans doute La Casa de la Memoria, un centre culturel consacré à préserver le passé andalou. On y va pour les soirées flamenco, très populaires. Dans son petit patio intime, j'ai vu l'émouvante chanteuse Sandra Bessis qui chante en ladino, l'ancienne langue judéo-espagnole, un répertoire sorti des temps médiévaux. La Casa se trouve dans la rue Ximénez de Enciso, un passage si étroit qu'il n'a d'espace que pour un promeneur à la fois.

Peu de visiteurs prennent la peine de traverser le Guadalquivir pour se rendre dans le quartier de Triana, et c'est dommage. Par le pont de Triana, on arrive au marché du même nom, le meilleur au centre-ville. Promenez-vous ensuite dans la rue del Betis, le long du fleuve, avec sa belle vue sur les monuments de la ville. Les cafés n'inspirent pas, mais heureusement vous ne serez pas loin du Siglo XVIII dans la rue Pelay Correa, tout près de l'église de Santa Ana. Dans ce petit restaurant traditionnel, vous goûterez le lointain passé arabe de l'Andalousie. Les épinards aux pois chiches sentent le cumin et la coriandre, et le poisson est servi mariné, non pas frit. Les yeux noirs des serveuses complètent le beau portrait.

Remplis sous: Espagne, Voyages Mots clés:
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