3
Sep/06
0

Revue de presse : L’olivier, arbre mythique

Philippe Mollé, Le Devoir les samedi 2 et dimanche 3 septembre 2006

Branche d'olivier, Baena, Espagne. (Photo Jacques Lanciault)Jamais dans l'histoire du bassin méditerranéen l'olivier, cet arbre sacré, n'a connu une telle popularité. Cet intérêt intrigue de nombreux agriculteurs, viticulteurs ou oléiculteurs qui ne savent plus quoi faire pour répondre aux attentes. Autrefois, on arrachait les oliviers pour laisser place à la vigne ou aux autres cultures plus rentables. Tant en Italie, deuxième producteur après l'Espagne, qu'en France, pourtant un tout petit producteur à l'échelle mondiale, on a très vite compris le regain d'intérêt pour cet antioxydant et, surtout, pour ce «médicaliment» utilisé tant pour ses multiples propriétés bénéfiques au système cardiovasculaire qu'en cosmétologie.

L'olive, fruit du sud?
Un dicton provençal l'affirme: «À la Sainte-Catherine, l'olive est dans le fruit.» Cela signifie qu'à cette date précise, soit le 25 novembre, on peut commencer à récolter à la gaule, voire au peigne pour certains, ce fruit qui passe du vert au rouge, puis au noir violet selon son degré de mûrissement.

Les olivades sont cette période délicieuse de la récolte des olives, parfois appelée vendange des oliviers. Profitant du climat doux de la Méditerranée, l'olivier voit s'accroître sa demande non seulement au sud mais aussi au nord. On en retrouve des variétés résistantes, tout comme dans le cas des palmiers, jusqu'en Bretagne. De là à penser qu'on pourrait y récolter des olives pour faire de l'huile, il ne faut quand même pas rêver. Tous les pays qui peuvent en assurer la culture voient grandir l'intérêt pour cet arbre mythique. On l'aime tout autant pour son tronc tortueux qui affiche ses souffrances au grand jour que pour les rameaux empreints d'histoire. Mais ce sont surtout les olives qui attirent les gens.

Les novices essaient parfois de consommer l'olive sur l'arbre. Le fruit est alors amer et requiert de longues préparations, tant pour les olives cassées (celles de table) que pour l'huile, qui impose une rigueur et une grande quantité de fruits afin d'obtenir un seul litre de ce précieux nectar.

Un véritable bouleversement a provoqué un changement dans l'assiette des consommateurs, qui apprécient de plus en plus l'huile d'olive dans la consommation de tous les jours. Depuis quelques années, tout comme pour le vin, la Chine s'intéresse elle aussi à ce produit provenant parfois du Chili, avec de nouveaux cultivars, ou d'Espagne, qui vient de subir coup sur coup deux augmentations majeures sur les marchés mondiaux.

Le retour à l'oléiculture
C'est bien beau les melons, les tomates ou le romarin, témoigne avec cet accent chantant le papa de Gilles Brun, ce nouvel oléiculteur que les anciens ont mis du temps à accepter pour maintenant lui faire confiance. Avec sa soeur et la cagnotte des parents et des grands-parents, il a construit il y a six ans, sur le sol de ses ancêtres non loin des Baux de Provence, un moulin à huile révolutionnaire. Ce moulin transparent montre en permanence au public la façon de faire pousser les oliviers, de les chouchouter jusqu'à la récolte et, surtout, de faire de l'huile. On obtient un résultat remarquable avec une huile d'exception qui remporte des prix tant dans son pays d'origine qu'en Italie ou en Asie.

Chez les Brun, maraîchers depuis toujours, on a changé de savoir-faire pour se consacrer à l'olivier. Gilles et sa soeur sont de jeunes et talentueux intellos passés par les meilleures écoles de commerce et de marketing et qui ont tout abandonné pour se consacrer à l'huile d'olive. Ils ont même ouvert, au-dessus du moulin, une super école de cuisine pour les chefs et les particuliers amoureux du divin nectar et de ses utilisations. On est même allé jusqu'à constituer depuis cinq ans sur le terrain un arboretum riche de 75 espèces différentes dont on suit l'évolution. C'est une véritable remise en question pour toute cette famille qui affronte la concurrence dans la cour des grands. Le Salon international de l'alimentation (SIAL) a été pour eux un tremplin qui a lancé l'exportation et permis au Moulin du Calanquet d'acquérir la notoriété espérée.

L'huile d'olive suscite plus d'intérêt que jamais, tant en France que partout autour du bassin méditerranéen. Sur le bord de la route, on vend des oliviers d'Espagne âgés de 20 ans pour 250 euros. Ce n'est pas cher quand on sait qu'il faut sept ans pour que l'olivier devienne productif et donne des olives tous les deux ans.

Dans le Nord, on s'imagine déjà, avec le réchauffement de la planète, en train de planter des oliviers. L'arbre sacré du Sud redevient à juste titre un symbole qui sert bien la gastronomie.

Reconnaître les trois fruités de l'olive
- Le fruité vert: il est dominé par des sensations herbacées. On y découvre des arômes d'artichaut cru, de fruits verts comme la pomme et un peu d'amertume et d'ardence. Il a une fraîcheur propre au moment de la trituration.

- Le fruité mûr: il correspond à l'état d'avancement de la maturité des olives au moment de la récolte. On retrouve des saveurs d'amande, de fruits rouges, de tilleul ou de fleurs. Peu d'amertume mais un goût de beurre.

- Le fruité noir: on retrouve à cette étape le séchage des olives, qui enlève toute la fraîcheur des arômes. On relève des notes de cacao, de champignon, de vanille et de fruits confits, sans aucune amertume mais plus de douceur. Ce goût particulier convient à certaines personnes qui préfèrent les huiles plus jaunes et plus douces, sans ardence.

Philippe Mollé est conseiller en alimentation. On peut l'entendre tous les samedis matin à l'émission de Joël Le Bigot, Samedi et rien d'autre, à la Première Chaîne de Radio-Canada.

Remplis sous: Espagne, Voyages Mots clés:
Commentaires (0) Trackbacks (0)

Aucun commentaire pour l'instant

Laisser un commentaire


Aucun trackbacks pour l'instant