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Isabelle Charest a raison… Il faut oser parler librement

Revue de presse

Mathieu Bock-Coté, le 6 février 2019

Le voile islamique est naturellement un symbole d’asservissement de la femme, qui sert à la marquer publiquement sous le signe d’un communautarisme particulier en plus de marquer son infériorisation dans une conception profondément inégalitaire des relations entre les sexes. C’est ce qu’a dit tout simplement, au moment d’entrer en fonction, Isabelle Charest, la nouvelle ministre de la condition féminine. Elle l’a dit dans ses propres mots. On ajoutera que le voile n’est pas un simple vêtement témoignant de la spiritualité de celle qui le porte. C’est un symbole politico-religieux. Il sert aussi à consacrer la visibilité politique d’un islam marqué par l’islamisme, qui entend occuper l’espace public et qui s’adapte moins à la civilisation occidentale qui l’accueille qu’il ne cherche à s’y implanter avec ses mœurs et à ses conditions.

Photo ci-dessus : Isabelle Charest, la nouvelle ministre de la condition féminine du Québec. (photo : Simon Clark)

Évidemment, bien des femmes musulmanes portent le voile sans être conscientes de cela. On ne doute pas de leur sincérité. Elles ont normalisé ce symboles et le portent en toute bonne foi. Elles ont droit à tout notre respect, naturellement. Mais ce n’est pas manquer de respect à leur endroit que de réfléchir publiquement à la signification d’un symbole qui se diffuse aussi rapidement. À moins de verser dans un relativisme généralisé, nous sommes bien obligés de rappeler que du point de vue de la civilisation occidentale, ce symbole est fondamentalement problématique. Et nous avons encore le droit, à ce qu’on en sait, de critiquer la signification culturelle et politique d’un symbole religieux dans nos sociétés démocratiques, où le blasphème selon les uns ne doit jamais devenir la censure des autres.

À tout le moins, il devrait en être ainsi. Car ce qu'a dit Isabelle Charest, nous n’avons plus vraiment le droit de la mentionner, et qui s’y risque en payera le prix. Peut-être parce qu’elle ne maîtrise pas encore tous les codes du politiquement correct, Isabelle Charest s’est permise de rappeler que 2 + 2 = 4. Dans les prochains jours, on fera tout pour lui faire dire que 2 + 2 = 5. À Ottawa, on ne la manque pas. Au Parti libéral du Québec, qui est désormais la succursale idéologique du Parti libéral du Canada au Québec, on ne se gêne pas pour faire son procès sans la moindre subtilité. Dans les médias, on l’accuse d’avoir dérapé, comme s’il existait un chemin étroit dont on ne doit pas sortir sans payer une contravention idéologique. Elle doit tenir bon sous une pluie de crachats, et cela n’est jamais agréable.

C’est à cela qu’on comprend ce qu’est le pouvoir symbolique dans une société et qui le possède: il s’agit de savoir qui impose les tabous et a le pouvoir de faire un scandale lorsqu’on ose les nommer. Qui a le pouvoir de décréter qu’une déclaration est «controversée»? Voyons-voir. Qui dit que le voile islamique est un symbole d’oppression est obligé de se justifier. Mais qui dit que le symbole islamique est un symbole anodin, exprimant une spiritualité personnelle, et qu'il faut se porter à sa défense en toutes circonstances se fait accueillir en humaniste. Tirons-en une conclusion: le multiculturalisme demeure l’idéologie dominante au Québec. Mais qu’Isabelle Charest tienne bon et refuse de reculer devant la détestable bien-pensance: l’immense majorité de la population est avec elle.

Allons plus loin. Il est urgent, et même absolument urgent, de se libérer du politiquement correct qui nous étouffe en en transgressant les interdits. Il ne s’agit pas de transgresser pour transgresser, mais simplement pour se redonner le droit de dire ce que l’on pense et qu’on refoule depuis trop longtemps, de peur de voir la police de la pensée nous coller une sale étiquette, comme raciste, xénophobe ou islamophobe. Le gouvernement Legault a la responsabilité historique de restaurer la liberté d’expression au Québec. Il devrait être possible de parler librement sans avoir devant soi une armée de censeurs qui nous demandent ensuite de nous excuser, parce que des professionnels de l’indignation victimaire sont parvenus à transformer une déclaration en offense identitaire ou religieuse. Que l'on soit favorable ou non au voile, on devrait avoir le droit de le dire.

Allons plus loin. Il y a dix ans, la fameuse position Bouchard-Taylor était considérée comme une position minimaliste, presque gênante, tellement elle manquait de mordant. Aujourd'hui, elle n'est pas loin d'être considérée scandaleuse par l'intelligentsia, et ceux qui s'y étaient ralliés cherchent à s'en dégager. En d’autres mots, le Québec officiel poursuit sa conversion à la logique diversitaire, qui détermine les limites du pensable et de l'acceptable. Le minimalisme d'hier est le maximalisme d'aujourd'hui. Plus nous tardons à trancher politiquement cette question, plus nous sommes avalés par l'imaginaire du multiculturalisme canadien. Ce n’est pas la «peur de l’autre» qui commande le sursaut identitaire de la société québécoise mais le désir naturel de rappeler que le peuple québécois est ici chez lui, et qu’il est en droit de demander à ceux qui le rejoignent d’en prendre le pli. Ici, l’émancipation féminine n’est pas optionnelle.

De là l'importance de la politique de laïcité à venir du gouvernement Legault. Elle rappellera le primat du politique dans cette querelle qui n'aurait jamais dû être confisquée par l'idéologie des droits et le gouvernement des juges qui l'accompagne. Comment douter maintenant des effets toxiques pour la conscience nationale des quinze années du régime libéral, qui a poussé plus loin que jamais la neutralisation de la différence québécoise dans les paramètres canadiens? Le Québec doit rompre avec la logique du multiculturalisme d’État canadien, qui nous arrache à nous-mêmes et nous force à penser dans des termes qui ne sont pas les nôtres. C’est une question d’autonomie nationale, de liberté d’expression et de simple bon sens.

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

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