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L’acharnement de Daphnée Gélinas a été récompensé

Revue de presse

Maxime Desroches, RDS.CA, 25 novembre 2016

Pascale Jalbert et Daphnée Gélinas

Comme dans plusieurs sphères de la vie, la capacité de se relever et de continuer d’y croire est un trait de caractère indispensable pour tout sportif. Comment réagir sans s’effondrer devant les déceptions auxquelles se heurte tôt ou tard l'athlète de haut niveau?

L’une des meilleures joueuses de baseball de son groupe d’âge au Canada, Daphnée Gélinas admet être passée par une période de remise en question en 2014. Elle avait beau n’être âgée que de 18 ans à l’époque, elle a eu du mal, l’espace de quelques mois, à s’imaginer poursuivre dans le sport qui pourtant la passionne lorsqu’on lui a fermé les portes de l’équipe nationale pour la deuxième fois.

Photo ci-dessus : Pascale Jalbert (13) et Daphnée Gélinas (10) sont avec Anne-Sophie Lavallée , les trois Québécoises de l’équipe nationale féminine du Canada.

Un tel refus était difficile à encaisser pour une jeune athlète habituée de tout faire tomber sur son passage depuis le moment où elle s’est adonnée sérieusement à la pratique de son sport. Son rêve de participer à une Coupe du monde aux côtés d’athlètes telles Ashley Stephenson et Nicole Luchanski, des joueuses auxquelles elle s’identifiait depuis plusieurs années, devait patienter deux autres années, au minimum.

« À ce moment, j’ai arrêté de jouer au baseball pendant trois mois, avoue la joueuse originaire de Repentigny. Je ne me suis pas entraînée du tout, parce que ce retranchement m’avait vraiment déçue. Mais au bout de ma réflexion, vers le mois décembre, je me suis aperçue que j’allais arriver à passer par-dessus. Ça n’a pas été long que je me suis mise à m’entraîner cinq à six fois par semaine, sur le terrain et en gymnase. »

La tenue pour la toute première fois d’un tournoi de baseball féminin lors des Jeux panaméricains présentés en juillet 2015, à Toronto, n’était pas étrangère au regain de motivation de celle qui évolue au sein d’Équipe Québec depuis qu’elle n’a que 12 ans.

Invitée par l’entraîneur-chef André Lachance à venir faire ses preuves, Daphnée Gélinas se rappelle avoir laissé toute une impression à un camp tenu à Cuba par l’équipe nationale en prévision de ces Jeux, au printemps.

« J’avais mis les efforts pour performer au meilleur de ces capacités et ça avait paru. J’avais très bien frappé et j’avais été solide défensivement aussi, selon ce qu’avaient dit les coachs par la suite », explique-t-elle.

Un épisode noir
Sauf que la même compétition qui s’était si bien déroulée pour la jeune Québécoise a laissé place à un malencontreux incident lors du dernier match de la semaine. Un jeu serré sur un relais à la plaque – une séquence qui semblait à première vue banale – allait s’avérer beaucoup plus dommageable qu’en apparence.

« J’ai poussé pour le marbre sur un jeu vraiment serré. Pour éviter de me faire toucher par le gant de la receveuse de l’équipe cubaine, j’ai glissé en position couchée, au lieu de la position de 90 degrés qui est la technique habituelle. C’est une manœuvre que je suis à l’aise de faire car je l’ai beaucoup pratiquée. Rendu à ce niveau, lorsqu’une catcher applique un tag sur son adversaire, ce n’est pas fait tout en douceur. C’est fait en fonction de passer le message de ne plus essayer ça. Donc, en plus de me faire appliquer un coup de gant solidement à la tête, j’ai aussi glissé et ma tête a donné contre le sol quelques instants plus tard. Donc ç’a fait deux impacts presque simultanés sur mon cerveau », se remémore Daphnée Gélinas.

Les effets de l’adrénaline et l’esprit compétitif de la jeune joueuse ont contribué à ce qu’elle puisse terminer la rencontre sans en ressentir immédiatement les contrechocs. Mais les conséquences d’un contact aussi percutant n’ont pas tardé à se manifester.

« Ç’a somme toute passé inaperçu à Cuba, mais quand je suis revenue au Québec, je me sentais super faible et j’avais tous les symptômes d’une commotion cérébrale. J’ai finalement passé un mois au complet sans pouvoir faire quoi que ce soit : assister à mes cours à l’école, me rendre au travail, voire même sortir de chez moi pour faire quelque chose d’aussi simple que de boire un café, car j’étais très sensible, à la musique par exemple lorsqu’elle était le moindrement trop forte », raconte-t-elle.

Tandis qu’elle cherchait simplement à retrouver un rythme de vie normal et que le baseball avait été relégué au bas de la liste de ses priorités, les rivales de Daphnée pour l’obtention d’une place dans l’effectif canadien aux Panams mettaient les bouchées doubles à l’entraînement.

Malgré sa fragilité et l’instabilité de sa condition, elle a néanmoins fait le voyage à Toronto pour prendre part au camp de sélection. À son grand étonnement, elle s’est montrée très aguerrie, particulièrement au bâton, en dépit du manque évident de répétitions. Défensivement cependant, c’était plus difficile, mais pas catastrophique.

« Ça faisait près d’un mois et demi que je n’avais pas attrapé de roulants, et ma condition faisait en sorte que je réagissais différemment aux balles frappées en direction de ma tête. J’avais une hésitation, ce qui était normal avec ce que j’avais vécu », raisonne-t-elle.

« Les entraîneurs voulaient aligner des joueuses en santé, donc je n’ai pas été prise. Ça restait tout de même une énorme déception et un choc, car plusieurs joueuses expérimentées de l’équipe m’avaient félicité à la fin du camp et croyaient que je m’étais fait une place avant l’annonce des joueuses retranchées. »

« Compte tenu de tout ça et de l’opportunité qui venait de me glisser entre les doigts, je me suis dit à ce moment-là que la Coupe du monde 2016 allait être celle de la dernière chance. Je ne me voyais pas pousser plus loin dans le baseball advenant un autre retranchement. »

L'acharnement finit par rapporter
Heureusement pour la jeune repentignoise, elle a pu se refaire une confiance en prenant part à un tournoi réservé aux joueuses d’âge junior, en République dominicaine, quelques mois avant la CDM. Cette compétition, durant laquelle elle estime avoir joué « le meilleur baseball de sa vie », a non seulement été un soulagement pour Daphnée Gélinas; elle a aussi servi d’avertissement aux entraîneurs d’Équipe Canada qu’elle ne pouvait pas briller uniquement sur la scène locale, mais aussi dans les rendez-vous internationaux.

Quelques semaines plus tard, le rêve se concrétisait finalement lorsqu’elle était nommée au sein de l’effectif de l’équipe nationale, en compagnie de deux autres Québécoises, Anne-Sophie Lavallée et Pascale Jalbert. Les trois joueuses allaient faire partie de l’équipe médaillée d’argent en Corée du Sud. Seul le Japon, puissance mondiale et champion des cinq dernières éditions de la CDM, aura eu le dessus sur les Canadiennes.

« C’était l’aboutissement de beaucoup d’efforts, donc j’étais vraiment fière. Pour cette première participation, je n’ai pas beaucoup joué, mais le feeling de représenter le Canada à l’étranger, c’est incomparable », raconte Daphnée Gélinas.

La grande flexibilité qu’elle alloue aux entraîneurs en raison de sa polyvalence pourrait être bénéfique dans l’optique de revivre l’expérience en 2018 – la Coupe du monde est un événement bisannuel –, selon la principale intéressée.

« Je suis avant tout une joueuse de deuxième but, mais je peux très bien tirer mon épingle du jeu à l’arrêt-court, au troisième but et dans le champ. J’ai aussi été receveuse pendant plusieurs saisons, avant de me blesser au genou. »

Gélinas est même tout à fait à l’aise à être envoyée sur la butte par ses entraîneurs si le besoin s’en fait sentir.

« Dans les matchs internationaux, on affronte parfois des nations moins menaçantes, l’Inde par exemple. Pour donner aux lanceuses de la rotation le plus de repos possible durant ces matchs de moins grande importance, je peux être appelée à aller au monticule deux ou trois manches », explique la joueuse dont la balle rapide fait osciller le radar à 69 miles à l’heure.

En attendant la chance de connaître une deuxième fois l’exaltation ressentie avec Équipe Canada, Daphnée Gélinas se concentre sur ses études universitaires en gestion de la relation consommateur – elle entreprendra une technique en réadaptation physique en 2017 – à l’Université Laval. Elle s’est aussi découvert une passion pour l’enseignement qui l’a menée à donner des cliniques à de jeunes joueuses qui débutent dans le baseball.

« Quelques dimanches durant l’hiver, je vais aller donner un coup de main auprès de jeunes filles de 5 à 7 ans. Ça me fait drôle de voir qu’elles sont aussi impressionnées en me voyant. Certaines me voient comme un modèle car il y en a très peu, des joueuses qui percent et font leur chemin dans ce sport. »

Ce n'est que le retour de l'ascenseur pour celles qui, il y a quelques années, rêvait d'imiter les Stéphanie Savoie et Vanessa Riopel et de représenter son pays sur la scène mondiale.

« Je trouve ça super de voir que le baseball gagne en popularité. Lorsque j’avais cet âge-là, je n’avais pas le choix de jouer dans un club de gars. J’avais déjà 16 ans lorsqu’on m’a approché pour la première fois pour jouer avec une équipe de filles. L’environnement et l’ambiance sont complètement différents. Mais je peux vraiment dire que je n'ai aucun regret par rapport à mon parcours! »

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

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