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Pouliot version améliorée

Revue de presse

Kathleen Lavoie, Le Soleil, le 6 mai 2016

Martin Pouliot

(Québec) Après une parenthèse de huit ans, l'ancien gérant des Alouettes et des Diamants, Martin Pouliot, effectue un retour à la barre d'une équipe de la LBJEQ, les Voyageurs de Saguenay. En ce jour de matchs d'ouverture dans le circuit Brulotte, le Charlesbourgeois d'origine, reconnu pour son caractère bouillant sur le terrain, reprend la casquette et la chemise avec une nouvelle attitude, dictée par la maturité de ses 48 ans et les huit dernières années passées à diriger son fils Samuel dans le baseball mineur.

Photo ci-dessus : Gérant controversé durant son passage à la barre des Alouettes et des Diamants, Martin Pouliot revient dans la LBJEQ à la tête des Voyageurs de Saguenay, assagi par les années... et la paternité. (Photo : Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve)

Martin Pouliot n'en était qu'à sa deuxième saison de coaching avec les Alouettes de Charlesbourg lorsqu'il a posé le geste qui allait contribuer à établir sa réputation de gérant controversé. Celui qui, deux ans auparavant, occupait toujours le poste de receveur de l'équipe, en était venu aux coups avec un joueur adverse, Patrice Boily. Fatigué de voir le lanceur des Voyageurs du Saguenay intimider ses hommes, le fringant gérant de 25 ans avait décidé de régler lui-même ses comptes. C'était en 1994.

«Je voyais que mes joueurs se faisaient écraser par lui. Le petit gars, il lançait gaucher, il avait des gros bras, il faisait du culturisme et les gars avaient peur. Puis, c'est toi, le chef de la gang... Après coup, ce sont des choses que je regrette avoir faites. Mais il avait atteint un de mes joueurs et avait été baveux par la suite», a justifié le nouveau patron des Voyageurs, qui s'était cassé un doigt dans l'altercation et avait été suspendu cinq matchs pour son geste.

Il ne s'agissait certainement pas du moment le plus glorieux de la carrière de 16 années de Martin Pouliot à la barre d'équipes de la LBJEQ, mais l'anecdote témoignait d'une intarissable «soif de gagner», estime-t-il. Quelque 22 ans plus tard, il traîne toujours, et bien malgré lui, sa réputation de gérant au style corrosif. Voire «anachronique», comme l'a qualifié son homologue des Castors CDE de Charlesbourg, Jean-Nicolas Blanchet, lorsqu'il a appris sa nomination au Saguenay.

«Elle est surfaite, cette réputation-là», se défend Pouliot aujourd'hui. «Je ne veux pas être dans la controverse. J'ai fait mon temps. Je trouvais ça plate que la première journée que j'ai été nommé, il y ait un autre coach dans la Ligue qui ait dit que j'étais dépassé. Quand on ressort tout le temps le passé d'un gars, ça le fait mal paraître et ça en ajoute sur la pile. Si je reviens, c'est pour les bonnes raisons», a affirmé celui qui gagne sa vie comme dépisteur professionnel pour les Capitals de Washington (LNH).

«Mes enfants savent lire...»
S'il a depuis longtemps tourné la page sur ces événements, c'est parce qu'il a adapté sa méthode de coaching avec les années, mais aussi parce qu'il est devenu père. «Et mes enfants savent lire...» laisse-t-il entendre, au sujet de Samuel, 15 ans, et Malory, 11 ans.

Agir pour le bien de ses enfants, Martin Pouliot sait ce dont il s'agit. Il avait 11 ans lorsque ses parents ont décidé de déménager de la paroisse de Sacré-Coeur, dans Saint-Sauveur, pour Charlesbourg, afin de permettre à leur fils unique d'avancer dans le baseball.

«Le baseball était moins structuré chez nous, alors qu'à Charlesbourg, il y avait de bonnes personnes dans le baseball mineur», se rappelle Pouliot.

Arrivé au niveau midget AAA, ce dernier s'est joint - surclassé - aux Alouettes de Charlesbourg, de 1985 à 1989. Également passionné par le hockey, il pratique ce sport en parallèle au niveau AA. Il espérait évoluer là aussi dans le midget AAA, mais l'entraîneur-chef de l'époque des Gouverneurs de Sainte-Foy, Jean-Louis Létourneau, lui avait servi un ultimatum : l'ailier gauche devait se présenter au camp de l'équipe, sinon il ne serait pas considéré. Le hic, c'est que Pouliot se trouvait alors en séries avec les Alouettes.

«L'année d'avant, dans le bantam AA, j'avais fini meilleur marqueur de la Ligue. J'étais convaincu qu'il allait me garder. C'est comme s'il m'avait dit : "Je sais qui tu es Pouliot. Je t'ai vu jouer. Mais si tu ne viens pas, je ne peux pas te prendre"», se remémore celui qui avait choisi le baseball, incapable d'abandonner son équipe junior en séries.

Au baseball, il a évolué aux positions de receveur et lanceur jusqu'au niveau junior, non sans s'être retrouvé sur le radar des dépisteurs du programme national et des Expos. «J'ai été invité au camp youth de l'équipe nationale, avec Denis Boucher, Marc Griffin et Jean-Robert Côté. À l'époque, Baseball Québec envoyait des joueurs sur l'équipe nationale du Canada. J'avais été dans les quatre ciblés dans la province pour y aller.

«Marc et Denis ont fait l'équipe. Ça leur a donné le tremplin pour leur carrière. Et Jean-Robert et moi, on a été coupés. [...] Il y a aussi René Marchand, qui était dépisteur des Expos à l'époque, qui m'aimait bien comme receveur. Il m'avait invité à faire un essai au camp des Expos en 1987 et à rencontrer le gérant Jim Fanning. Mais à 19 ans, je me suis blessé à l'épaule droite. Ça m'a fait plafonner.»

La dynastie des Alouettes
Une fois son stage junior terminé en 1989, Pouliot passe presque immédiatement au coaching, d'abord dans le midget AAA, en 1991 et en 1992 - deux saisons couronnées de championnats -, puis avec les Alouettes, en 1993. Après deux saisons infructueuses, la formation de Charlesbourg est, sous sa gouverne, devenue une véritable dynastie, alignant cinq championnats des séries de la LBJÉQ, entre 1995 et 1999, avec des joueurs comme Patrick Deschênes, Jocelyn Blais et Olivier Lépine.

«Ces années-là, on avait une organisation solide. On avait le père à Patrick Deschênes qui amenait beaucoup de commanditaires à l'équipe. Il me disait : "Tu veux tel joueur? On va aller le chercher!" On avait un personnel d'entraîneurs sur la coche. On avait aussi des bons joueurs», juge celui qui, pendant cette séquence, a vu son travail être souligné par de multiples nominations comme gérant de l'année aux niveaux provincial et national.

Après huit saisons à Charlesbourg, Pouliot entame une autre huitaine, à Québec celle-là. Un peu moins fructueuse que la précédente, elle lui permettra notamment de décrocher, à la barre des Diamants, un championnat de saison régulière (fiche de 42-8), en 2004.

Pendant ces 16 années de baseball junior, Pouliot mènera, en outre, ses clubs à de multiples podiums nationaux au Championnat canadien junior et aux Jeux du Canada.

La combinaison du décès de son père Gilles en 2007 et de la fin de son contrat avec les Diamants allait ensuite l'amener à se rapprocher de son fils Samuel, dont il a été l'entraîneur à différents niveaux, d'atome A à bantam AA, entre 2008 et 2015. Avec les Warriors de la Capitale, il a remporté une médaille d'or aux Jeux du Québec en 2014 et une médaille d'argent au Championnat canadien de 2015.

«J'ai coaché Samuel, mon garçon, au cours des huit dernières années. Dans le fond, moi, je fais des huit ans! J'ai dirigé à Charlesbourg huit ans, à Québec huit ans et j'ai dirigé mon gars huit ans. Je l'ai dit en blague aux gens de Jonquière, mais peut-être que je vais être là huit ans!» a-t-il lancé au sujet des Voyageurs, qu'il compte mener à un titre d'ici quatre ans.

Une Coupe Stanley avant un autre titre dans la LBJEQ?
À l'emploi des Capitals de Washington depuis 1998, Martin Pouliot a largement contribué à l'assemblage de l'équipe qui aspire présentement à remporter la Coupe Stanley. Selon le dépisteur, la bande à Ovechkin doit profiter de sa fenêtre d'opportunité, parce qu'elle ne restera pas ouverte bien longtemps.

Deux ans, c'est le temps que Martin Pouliot donne aux Capitals pour soulever le précieux trophée, après quoi il deviendra plus difficile de présenter le genre d'alignement qu'ils affichent présentement. «Dans deux ans d'ici, il va falloir payer Evgeny Kuznetsov. Il devrait gagner la même affaire qu'Alex Ovechkin et Nicklas Backstrom et on ne pourra pas garder tout le monde. C'est pour ça que notre fenêtre est dans les deux prochaines années.

«Quand on a signé Matt Niskanen et Brooks Orpik, oui, il a fallu les surpayer un peu, mais c'était là ou jamais. Il faut gagner pendant qu'Ovech¬kin et Backstrom sont à 30 ans. Il ne faut pas attendre», croit-il.

À temps plein chez les Capitals depuis 2005, Pouliot a, avec un groupe d'une douzaine de dépisteurs des Capitals mené par Ross Mahoney, consacré les 10 dernières années de sa vie à bâtir une équipe gagnante à Washington. La dernière chose qu'il souhaite voir arriver serait que d'autres dépisteurs obtiennent le crédit d'une conquête.

«Mettons qu'on ne gagnerait pas dans les deux prochaines années et qu'il y avait un ménage. Il y aurait une nouvelle gang qui arriverait et se promènerait avec des bagues de la Coupe Stanley, alors que ce ne serait pas eux autres qui auraient fait le solage de l'équipe...» a-t-il laissé entendre, rappelant que le club aligne présentement une douzaine de joueurs repêchés par l'organisation.

Un travail d'équipe
Pour Pouliot, une Coupe Stanley représenterait l'aboutissement de près d'une vingtaine d'années de travail dans le hockey professionnel. Le Québécois avait obtenu sa première chance chez les Stars de Dallas en 1997, après que son ami Alain Rioux l'eut pistonné auprès de Bob Gainey. L'année suivante, il était embauché à titre de dépisteur amateur par les Capitals, avant de devenir dépisteur professionnel, il y a trois ans.

«Être dépisteur, c'est un travail d'équipe. Tu n'es pas juste jugé par ce que tu as pris. En même temps, je sais très bien que les deux joueurs qui m'ont fait bien paraître, aux yeux de mes patrons, ce sont Mathieu Perreault [6e ronde, 177e au total, 2006] et Johnny Oduya [7e ronde, 221e au total, 2001]. Oduya jouait à Moncton et Victoriaville. Il n'était pas sur le radar de la Centrale de recrutement de la LNH. Mathieu Perreault, c'était la même affaire. Ce sont vraiment deux joueurs qui m'ont aidé à gagner du galon», a-t-il raconté, rappelant que ce sont les choix tardifs qui contribuent à bâtir la crédibilité d'un dépisteur.

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

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