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Le retour du baseball à Montréal : à quel prix ?

Revue de Web

Brian Myles, L’Actualité, le 12 novembre 2014

ExposNation

Pendant que Denis Coderre exige des sacrifices des fonctionnaires montréalais et que Philippe Couillard entraîne le Québec dans une ère d’austérité, un groupe d’investisseurs lance des ballons d’essai sur le retour du baseball majeur dans la métropole.

La Presse révélait, la semaine dernière, que investisseurs montréalais étaient intéressés à faire revivre les Expos en se portant acquéreurs de la franchise (en difficulté) des Rays de Tampa Bay.

Ces investisseurs potentiels ont les poches profondes : Stephen Bronfman, Bell Media, Larry Rossy (Dollarama) et Mitch Garber (Caesars Acquisition) sont assis sur des fortunes considérables.

La sortie tombe plutôt mal. Le club des millionnaires et des milliardaires aura besoin de l’aide étatique pour se payer un rêve de petit garçon en culottes courtes.

Dans l’histoire récente du baseball majeur, deux stades de baseball ont été construits entièrement avec des fonds privés, à San Francisco et à St. Louis. Les 28 autres ont bénéficié d’importantes contributions financières des administrations municipales.

Sans surprise, le retour du baseball à Montréal passe aussi par la manne étatique. Selon une étude commanditée par la Chambre de commerce, Projet Baseball Montréal, Ernst & Young et BCF, le projet serait viable dans la mesure où un stade neuf serait construit — à même les fonds publics — dans un rayon de 2 km du centre-ville.

L’étude de 2013 évalue à 500 millions de dollars les coûts de construction d’un nouveau stade. L’ancienne demeure des Expos, le Stade olympique, est jugée trop lointaine, vétuste et peu attrayante pour les amateurs.

L’étude propose que l’État absorbe les deux tiers du coût de construction, pour une facture de 335 millions. Un autre bel exemple d’un principe cher au capitalisme : la socialisation du risque et la privatisation des profits.

Imaginez un peu la tête de Denis Coderre et de Philippe Couillard lorsque viendra le temps de défendre ces investissements publics. Coupes dans les services à la population, hausses des tarifs, sacrifices par-dessus sacrifices exigés des contribuables… pour mieux récompenser les nababs de la balle.

Les investisseurs potentiels n’ont pas besoin de l’État. Ils sont solvables et ne devraient pas avoir trop de difficultés à convaincre un prêteur privé de leur allonger l’argent (même s’il faut compter un autre demi-milliard, au bas mot, pour l’acquisition de l’équipe).

C’est d’autant plus vrai que l’étude de faisabilité mise sur un engouement délirant du public pour le baseball, en anticipant une assistance moyenne de plus de 27 000 personnes par match (à 30 dollars le billet).

La prudence est de mise avant d’engager des fonds publics dans la construction d’un nouveau stade, d’autant plus que Montréal ne bénéficie pas des leviers fiscaux des grandes villes américaines.

Celles-ci ont la chance de percevoir une partie des taxes de vente, ce qui confère une certaine logique aux investissements publics dans l’aménagement des stades. Les villes américaines du baseball ne sont pas que de simples organismes subventionnaires. Elles peuvent capitaliser sur leurs investissements.

Dans l’environnement fiscal québécois, que resterait-il pour Montréal après avoir participé à la construction d’un stade ? Des taxes foncières.

À moins d’une sérieuse discussion pour élargir l’assiette fiscale de la métropole, l’administration Coderre a peu d’intérêt à s’impliquer dans le projet. Il faut lui offrir des nouveaux leviers, comme un accès à la taxe de vente, pour en faire un partenaire potentiel.

Dans l’état actuel des choses, seul le gouvernement du Québec a un intérêt à investir dans le retour du baseball. Les recettes annuelles (TVQ, impôts, etc.) sont évaluées à 56 millions de dollars pour le fisc québécois.

Au-delà des chiffres, il y a des principes. Combien de places en garderie, de lignes d’autobus, de bourses aux études supérieures peut-on se payer avec 335 millions ?

Est-ce le rôle de l’État de subventionner le sport professionnel dans un climat d’austérité ? Oubliez les 335 millions et les projections de retombées. Le prix politique est tout simplement trop élevé.

* * *

À propos de Brian Myles
Brian Myles est journaliste au quotidien Le Devoir, où il traite des affaires policières, municipales et judiciaires. Il est présentement affecté à la couverture de la commission Charbonneau. Blogueur à L’actualité depuis 2012, il est également chargé de cours à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). On peut le suivre sur Twitter : @brianmyles.

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

Remplis sous: Baseball et softball Mots clés:
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  1. Pourquoi plusieurs personnes mélange les choses. Les coupures gouvernementales sont une chose mais un investissement en est une autre. Le but d’une coupure est de sauver de l’argent dans les dépenses alors qu’un investissement à pour but de faire de l’argent plus tard….tout comme un placement. Le stade serait un investissement avec des retombés économiques très importantes et n’est en aucun temps une dépenses. Juste avec les impôts des joueurs, le stade se financerait. Et ce, c’est sans compter les autres retombés telles les utilisateurs DL hôtels, restaurants et employés. Tout ce beau monde paieraient des taxes et des impôts. Les clubs professionnels attire des gens de l’exterieur qui apporterait des argents neuf avec leur dépenses.

    Et il y a le plan de financement de Dominic Therrien qui serait intéressant à analyser la faisabilité.

    En passant, l’article dit que les Rays sont en difficultés…ce qui est nullement le cas. Son propriétaire est très riche. Le problème est que le marché des Tampa n’est pas bon…sans appuis corporatif. Et la moyenne d’âge de la population est très vieille et préfère regarder les matchs à la TV. La preuve est que leur « ratings » sont bons…ce qui explique qu’il n’y a personne dans les estrades.

    Si on « investi » dans un stade et que le riche proprio des Rays déménage son équipe ici, on a pas besoin des richismes Montralais qui sont perçu comme des gens qui veulent se payer un jouet. A moins que ce soit comme partenaire minoritaire.

    Alors la question était… »à quel prix ». Que le timing ne soit pas bon par rapports au coupures…on s’en fou !!! C’est un investissement.

    Pensez vous que les gouvernements fédéral et provincial et la ville de Québec on « investi » sans garanti d’une équipe de la NHL à Québec? De toute façon dans le cas du baseball, on pourrait y aller de la construction d’un stade pcq on aurait les Rays qui joueraient au stade Olympique pendant 1 saison en attendant la construction.

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