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Le mot du jour : yézidie (la femme yézidie)

Textes et recherches de Jacques Lanciault

Je consigne ici le fruit de recherches sur le sens, l’étymologie, l’écriture ou encore la prononciation de certains mots ou expressions sur lesquels je bute, ou qui tout simplement suscitent ma curiosité au fil de mes lectures...

669428-displaced-people-from-minority-yazidi-sect-fleeing-violence-from-forces-loyal-to-islamic-state-in-siMardi, 26 août 2014

Source de la recherche
Les paragraphes suivants d’un éditorial de Serge Truffaut publié dans le quotidien Le Devoir du 22 août 2014 :

«Le journaliste américain James Foley a été exécuté par un sbire de l’État islamique (EI) comme bien d’autres avant lui l’avaient été, soit par décapitation. Avant comme après, l’EI s’est APPLIQUÉ et s’appliquera, avec un soin méticuleux, à traduire dans les faits les plus observables qui soient tout ce que la barbarie suppose ou permet.

Le reporter Foley a été tué selon un modus operandi qui en dit long sur la sauvagerie de ses bourreaux. Ceux-ci ont enregistré les derniers mots qu’il a formulés par lui et qu’ils lui avaient imposés avant de filmer une suite qu’il faut bien nommer pour ce qu’elle est : une saignée. Après quoi, le film de ce qu’il faut bien appeler le comble de l’horreur a été diffusé sur la toile. L’objectif ? Semer la peur, l’effroi, au sein du contingent des infidèles, de tous ceux qui ne pensent pas comme eux. De tous ceux et celles qui sont impurs.

Chez ces fous de Dieu, la minutie avec laquelle il faut composer constamment pour étrangler ce qui rappelle l’univers des infidèles, qui fait donc le lit de ce qui est impur, nous enseigne que leur conception du monde est une copie carbone de celle partagée jeudi par les Aryens : l’autre, le différent, doit être l’objet permanent de l’éradication. Et ce, jusqu’à ce qu’il disparaisse à jamais.

Dans cette histoire faite de fureurs, ainsi qu’en témoigne l’épisode Foley, il faut retenir et souligner que le fondement idéologique ou théologique de l’EI est le suivant : ramener la vie d’aujourd’hui à celle qui prévalait au temps du prophète, soit au… VIIe siècle ! Autrement dit, l’idée même de progrès doit être bannie. L’ombre de la rationalité doit être étouffée. Le recours aux objets modernes doit être prohibé. Bref, on se doit de répéter pour la énième fois que qualifier les agissements de l’EI de féodaux revient à insulter le Moyen Âge, l’EI étant un héritier de l’âge de pierre.

Au ras du bitume, cette adoration pour la gloire du califat a eu pour conséquences terribles et récentes ce qui suit : selon l’inventaire de l’ONU, l’EI a exécuté 1700 personnes à Tikrit. C’est dans cette ville que les nervis de l’EI se sont APPLIQUÉS à photographier les pelotons d’exécution. À Mossoul, ils ont tué, assassiné et pendu les chrétiens d’abord avant d’imposer une charte qui tient en deux pages et deux pages seulement. Cette dernière, on le devine, interdit le tabac, l’alcool, les manifestations. Elle stipule que l’argent du public sera remis entre les mains des imams, qui pourront en disposer comme ils l’entendent. Quoi d’autre ? Les femmes…

Les femmes doivent adopter le niqab. Celui, pour être précis, qui laisse entrevoir les yeux et seulement les yeux. Elles ne peuvent sortir de chez elles qu’en cas « d’extrême nécessité » et accompagnées par le père, le mari ou le frère. La femme yézidie étant d’une autre religion, elle est apostate, mais elle reste femme. Et alors ? Il suffit de la convertir et d’en faire ainsi l’esclave du militant de l’EI. On rapporte cela pour mieux souligner que pas moins de 1500 femmes yézidies sont prisonnières de l’EI depuis une quinzaine maintenant.»

Définition
Le dictionnaire du correcteur électronique Antidote propose la définition suivante pour le nom yézidier: «Membre d’une secte chiite.»

Quant à l’encyclopédie libre Wikipédia elle propose la définition suivante pour le terme yézidisme :

« Le yézidisme est un courant religieux qui est présenté par ses pratiquants (les Yézidis ou Yazidis) comme plongeant ses racines dans l'Iran antique. On retrouve de nombreuses similitudes entre le yézidisme actuel et les religions de l'Iran ancien. Ainsi le yézidisme est considéré comme une survivance du mithraïsme iranien qui s'est adapté à un environnement hostile en absorbant des éléments exogènes. Cependant d'autres études (européennes ou celles de théologiens musulmans) le considèrent comme un mouvement hétérodoxe de l'islam sunnite apparu au XIIe siècle et sur lequel des éléments pré-islamiques ont par la suite été greffés, en utilisant des pratiques anté-islamiques conservées dans le Kurdistan, notamment postérieurement à Cheikh Adi. »

Le quotidien français « Le Monde » a publié le 12 août dernier un texte éclairant sur les yézidis

Qui sont les yézidis, cible des djihadistes en Irak ?

Sophie Gilig, Le Monde, 12 août 2014

C'est l'une des cibles des djihadistes de l'Etat islamique (EI) en Irak : la communauté kurdophone des yézidis. Avec la prise de leur bastion, Sinjar, le 3 août, 35 000 yézidis ont dû fuir dans les montagnes, sans eau ni nourriture, sous une chaleur pouvant atteindre les 50 °C. Adorateurs du diable pour certains, païens pour d'autres, les membres de cette communauté sont persécutés depuis longtemps.

Qui sont les yézidis ?
Les yézidis sont une communauté kurdophone qui compte entre 100 000 et 600 000 personnes en Irak, selon les estimations. Ils font partie des populations les plus anciennes de la Mésopotamie, où leur croyance est apparue il y a plus de quatre mille ans. Leur principal lieu de culte est Lalech, dans le Kurdistan irakien, mais plusieurs milliers de yézidis habitent en Syrie, en Turquie, en Arménie et en Géorgie.

On compte d'importantes communautés en Europe, particulièrement en Allemagne, où vivent 40 000 yézidis.

Quelles sont leurs croyances ?
« Les yézidis ont enrichi leur religion par des apports coraniques et bibliques pour se camoufler des musulmans et des chrétiens afin de ne pas trop se faire remarquer », indique Frédéric Pichon, chercheur et spécialiste du Proche-Orient à l'université François-Rabelais de Tours. Le yézidisme est une religion monothéiste qui puise une partie de ses croyances dans le zoroastrisme, la religion de la Perse antique. Leur culte et leurs rituels se transmettent oralement, c'est pourquoi on ne devient pas yézidi, on naît yézidi.

Les fidèles de cette religion croient en un dieu unique, Xwede, qui fut assisté par sept anges lorsqu'il créa le monde, dont le plus important est Malek Taous, souvent représenté par un paon, symbole de diversité, de beauté et de pouvoir.

Comme pour les musulmans et les chrétiens, le bien et le mal occupent une place importante chez les yézidis. Présents dans le cœur des hommes, il ne tient qu'à eux de faire le bon choix.

Pourquoi sont-ils persécutés ?
Si les yézidis sont persécutés depuis la nuit des temps, c'est parce que les autres religions, que ce soit l'islam ou le christianisme, ont une interprétation erronée de leur culte. « En Irak et en Syrie, on les a pris pour des adorateurs du diable parce qu'ils ont fait une espèce de bricolage entre les deux religions du Livre », précise Frédéric Pichon. L'archange Malek Taous a ainsi faussement été pris pour le diable par les musulmans. Certaines pratiques et restrictions des yézidis peuvent paraître farfelues. Par exemple, les yézidis ne peuvent manger de laitue ou porter des vêtements bleus.

Ces pratiques ont contribué à créer une forme de mépris chez leurs voisins musulmans. « Les yézidis sont des adorateurs du feu, ce qui les fait apparaître comme des païens aux yeux des Syriens, complète Frédéric Pichon. L'islam n'a pas de considération pour cette religion, contrairement au christianisme et au judaïsme, qui sont tolérés. »

Quelle est la situation actuelle des yézidis ?
« La situation des réfugiés yézidis est particulièrement dramatique. Des populations entières sont dans le plus grand dénuement, ceux du Sinjar risquent de disparaître. Certaines familles rencontrées à Zakho, près de la frontière turque, ont marché pendant trois ou quatre jours », raconte Sébastien de Courtois, journaliste indépendant et producteur à France Culture, qui se trouve actuellement à la frontière turco-syrienne. « La peur panique se lit encore dans leurs regards. Les scènes de carnage qu'ils racontent sont insoutenables. Les forces de l'EI s'acharnent contre eux. Ils veulent tous les assassiner », ajoute Sébastien de Courtois.

D'après Frédéric Pichon, l'Etat islamique APPLIQUE à la lettre la doctrine de l'islam conquérant. « L'EI est dans une logique de régénération de l'islam, dans une volonté de purification de la religion comme l'étaient les “Born again Christian” , les atrocités en moins », précise-t-il.

« Le problème yézidi n'est pas un problème religieux, c'est une question de domination totalitaire, renchérit Jean-Pierre Filiu, professeur des universités à Sciences Po. Une fois que l'EI en aura fini avec les yézidis, il s'en prendra à une autre minorité. »

Ce n'est pas la première fois que les yézidis sont persécutés. En août 2007, quatre attentats-suicides simultanés coordonnés par Al-Qaida en Mésopotamie avaient causé la mort d'environ 400 personnes, représentant l'attentat le plus meurtrier depuis le 11 septembre 2001.

Le déclencheur d'un tel carnage ? Les terroristes n'avaient pas supporté qu'un jeune garçon yézidi tombe amoureux d'une jeune sunnite, selon M. Pichon.

En 2001, 900 Kurdes d'Irak, originaires des régions pétrolières de Mossoul et Kirkouk, alors sous le contrôle de Saddam Hussein, avaient fait naufrage à bord du navire East-Sea, au large de Fréjus, dans le Var : 70 % des naufragés étaient de confession yézidie et disaient subir des persécutions au quotidien à cause de leur religion.

Revue de presse publiée par Jacques Lanciault.

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  1. Merci pour toutes ces informations, ça m’a aider à mieux comprendre ce terme que je viens de découvrir.

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