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Revue de presse : Barcelone – Statues humaines sur Las Ramblas

Lilianne Lacroix, La Presse, cahier Vacances Voyage, samedi 5 août 2006

Statue humaine, Las Rambla, Barcelone, Espagne (photo : Jacques Lanciault).Cléopâtre, cow-boys jumeaux ou mandarin chinois, ils sont là, à ne rien faire de leurs journées. Et c'est là leur principal attrait. Les statues humaines sont aux Ramblas de Barcelone ce que sont les gardes imperturbables de Buckingham Palace à Londres ou les gardes suisses du Vatican, une sorte de signature en chair et en os de la métropole catalane.

Entre les bateleurs, les musiciens de rue, les marchands d'oiseaux, les fleuristes, les kiosques à journaux et les terrasses remplies de badauds, c'est une véritable galerie de statues humaines, succession de personnages anciens, modernes ou totalement éclatés qui occupent le terre-plein de Las Ramblas. De la Plaza de Catalunya, véritable coeur de Barcelone jusqu'à la statue de Colomb en bordure de mer, les Ramblas se succèdent pour former un immense boulevard beaucoup plus piétonnier que carrossable puisque les autos doivent s'y faufiler sur deux passages minuscules encadrés entre les trottoirs et le terre-plein toujours bondé de passants, de jour comme de nuit. En arabe, Rambla signifie torrent et rappelle qu'un cours d'eau a déjà coulé à cet endroit. S'ils forment un ensemble homogène incontournable, chaque petit tronçon a été baptisé: Rambla de Canaletes, de Sant Josep, dels estudis ou des Caputxins, sept au total que les citoyens se contentent de rassembler simplement sous l'appellation plurielle: Las Ramblas. C'est là que se concentrent, en un véritable musée de rue, les statues humaines.

Étrange galerie en plein air dont les tableaux sont aussi variés qu'immobiles: dorée des pieds à la tête, une statue à tête couronnée de fleurs et portant un violoncelle mou rappelle un tableau de Dali; une autre, portant cape noire et faux, symbolise la mort; un autre artiste s'est transformé en arbre. Ici, on aperçoit un homme figé dans sa course, le bras éternellement tendu vers on ne sait qui ou quoi, sa cape immobilisée en plein vol derrière lui, là un autre, cul par-dessus tête, condamné à demeurer dans une position impossible.

Quand on met quelques sous dans l'écuelle, les statues s'animent pour permettre à leur "bienfaiteur" de se faire prendre en photo auprès d'elles. Par contre, si on a l'impudence de vouloir soutirer un souvenir sans en payer les droits, la statue bougera très légèrement, juste assez pour masquer son visage.

Soudain, un immense attroupement. Même les Barcelonais, pourtant un peu blasés, se sont arrêtés, subjugués. Certains, incrédules, regardent leur montre, puis chuchotent à leurs voisins en ne quittant pas le personnage des yeux. Vêtu d'une redingote, d'un haut-de-forme et d'une horloge qui lui décore la poitrine, l'homme semble coulé dans le bronze des pieds à la tête. Il est appuyé à un lampadaire. La posture est si naturelle, le maquillage si parfait, qu'on jurerait qu'il a été paralysé par pure magie. Contrairement à ses congénères, il laisse les gens l'approcher sans même ciller. Pour lui, pas la moindre occasion de relaxer ses muscles volontairement paralysés. En fait, c'est ce qui mystifie complètement le public dont la générosité est à la hauteur de l'admiration. On entend constamment les pièces tomber dans l'écuelle que l'homme-statue a déposé devant lui:"Je suis ici depuis quatre minutes, et il n'a même pas battu des cils", lance un Barcelonais, visiblement impressionné. En 10 minutes, le personnage cillera à peine deux ou trois fois et récoltera une petite fortune.

En une semaine, on ne l'a vu qu'une fois. Il a sans doute récolté en ce seul jour autant que toutes les autres statues humaines en une semaine.

Remplis sous: Espagne, Voyages Mots clés:
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