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Revue de presse : Exit le flamenco, viva la zambra!

Lilianne Lacroix, La Presse, cahier Vacances Voyage, samedi 19 août 2006

Spectacle de Flamenco, Madrid, Espagne.Pourchassés à travers l'Europe, certains gitans se sont réfugiés pendant des siècles dans les hauteurs du Sacromonte, au-dessus de Grenade, plus loin encore que le magnifique quartier arabe de l'Albacin et bien au-delà des étonnantes dentelles architecturales de l'Alhambra. Là, en compagnie de juifs et de musulmans eux aussi méprisés par le monde chrétien, ils se sont creusé des maisons à même le flanc de la montagne et y ont vécu, à l'abri du monde qui les rejetait, une existence troglodyte. Pendant longtemps, ce fut leur univers où peu de gens osaient s'aventurer.

Photo tirée d'un spectacle de flamenco donnée à Madrid le 30 septembre 2005. (Photo Jacques Lanciault)

N. B. — Pour agrandir la photo, il suffit de cliquer sur celle-ci.

C'était toutefois compter sans ces pluies torrentielles qui ont endommagé maintes grottes en 1962, puis la poussée immobilière de la fin du XXe siècle et du début du XXIe, qui a rendu les habitations troglodytes à la mode et les grottes gitanes de moins en moins abordables pour les familles qui les avaient jusque-là habitées. La population gitane a donc commencé à migrer vers le Sud et vers les quartiers moins à la mode et moins chers. Le mouvement étant relativement nouveau, le Sacromonte demeure toutefois encore le quartier gitan par excellence tant dans l'esprit que dans la réalité. Mais pour combien de temps encore?

Parmi ces grandes familles gitanes, demeurées sur place, certaines gardent la tradition vivante en organisant, dans leurs habitations troglodytes dont les murs-cocons arrondis accentuent l'intimité, des soirées de zambra.

Un flamenco festif
La zambra, c'est un peu beaucoup le flamenco mais sans son côté tragique et solennel. La zambra, c'est avant tout festif, souvent familial et conçu notamment pour célébrer les mariages. C'est d'ailleurs justement une évocation des noces gitanes que les familles de "zambristes" nous offrent le plus souvent dans une des grottes alignées tout le long du tortueux Camino del Sacromonte. Évidemment, a-t-on besoin de le souligner, la zambra a longtemps été condamnée par le clergé espagnol, qui n'avait guère de sympathie pour les soirées plaisantes et bien arrosées. Ne disait-on pas d'ailleurs que la zambra "fait chavirer les coeurs dans les volants des jupes"? Rien pour rassurer ces austères religieux espagnols, qui avaient la condamnation facile - le bûcher n'était jamais très loin.

À la Cueva de la Rocio, sous la houlette énergique de l'aïeule, cousins, cousines, frères, soeurs, oncles et tantes reçoivent régulièrement pour des soirées de zambra. Ce soir-là, les touristes étaient un peu dissipés, particulièrement un groupe de femmes asiatiques qui avaient visiblement levé le coude quelques fois avant même d'arriver et qui gloussaient sans gêne dans leur coin. Grand-mère a rapidement pris les choses en mains en prenant elle-même le plancher et en esquissant, avec un air d'impératrice qui en a vite imposé aux effrontées, quelques pas de flamenco. Chanteurs et guitaristes encouragent sans cesse les danseurs, les poussant à se dépasser dans une sorte de compétition amicale. Le point culminant: le duo des mariés, qui se conclut par une invitation à quelques visiteurs à se joindre à la danse.

Au-dehors, une vue imprenable sur l'Alhambra illuminé est servie comme magnifique point final à la soirée.

Il ne faut toutefois pas compter sur la visite de l'Albacin promise dans le coût du billet (environ 25 euros incluant une consommation): on ne fait que l'effleurer en route vers les hauteurs du Sacromonte. Il vaut mieux retourner le lendemain dans le charmant quartier arabe tout de blanc vêtu et flâner un peu dans les boutiques, salons de thé et au hasard des rues étroites.

On peut aussi visiter, de jour, le Centre d'interprétation du Sacromonte où on vous racontera la légende des hommes noirs à la recherche d'un trésor, ainsi que l'abbaye construite après la découverte de fausses reliques et qui a valu son nom au mont Sacré.

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