La Libye à la présidence de la Commission des droits de l’homme de l’ONU

Texte de Jacques Lanciault rédigé dans le cadre d’un cours de journalisme à l’Univesité de Montréal. Le travail consistait à rédiger un texte critique comparant la couverture d’un événement dans différents quotidiens.

Montréal le 27 février 2003 - Le 20 janvier dernier, la représentante libyenne, Madame Najat Al-Hajjaji, était élue présidente de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, et ce, malgré l’opposition de trois pays, dont le Canada et les États-Unis. Cette nouvelle troublante, la Libye étant un des pays le moins recommandable au monde quant au respect des droits de l’homme, n’a pas fait la Une, ni de La Presse, ni du Devoir et à tout bien considérer elle a reçu une couverture médiatique plutôt mince, du moins ici au Québec.

Pourtant quelques heures avant la confirmation de cette nomination, Serge Truffaut, éditorialiste au quotidien Le Devoir, y allait d’un texte vitriolique mentionnant même que ce choix « ne constitue rien de moins qu’un kidnapping des droits de la personne. »

Au lendemain de l’élection, Le Devoir a joué un texte, non signé de l’agence Reuters, expliquant la position des États-Unis et du Canada. Le Devoir complète sa couverture par la publication d’une caricature de « Garnotte » (Michel Garneau), ne laissant planer aucun doute sur le ridicule de la situation. Un pays ne se pliant pas aux exigences de l’ONU en matière de respect des droits de l’homme qui présidera, un an durant, la Commission qui voit justement au respect de ces dits droits.

Couverture similaire offerte par La Presse : le journaliste Gilles Toupin révélait le 16 janvier, que le Canada allait s’opposer à l’accession de la Libye à la présidence. Puis, le jour de l’élection, le quotidien de la rue St-Jacques, tout comme Le Devoir l’avait fait, reprend à son compte un texte de l’agence Reuters, celui-là signé de Richard Waddington.

Le lendemain de l’élection, Gilles Toupin, fait état sur deux colonnes des jeux de coulisse qui ont précédé le scrutin, explique et présente les réactions du ministre des Affaires étrangères du Canada, Bill Graham, et du chef de l’opposition officielle, Stockwell Day de l’Alliance canadienne. Pour sa part, Mario Roy, de l’équipe éditoriale du quotidien de la firme Gesca, explique « comment sombrer dans les tréfonds de l’absurdité. ». Il y dénonce également avec vigueur l’Europe qui lors du vote s’est abstenue, « admirable leçon de courage » précise-t-il. La Presse joue elle aussi la carte de la caricature pour véhiculer son propos éditorial. Le dessin de Serge Chapleau ouvre la porte à l’imaginaire du lecteur quant aux conséquences possibles ce cette élection.

Par la suite, dans les deux quotidiens, le silence le plus complet. Autant chez les éditorialistes que dans les pages Forum et Idées. À croire que les menaces de guerre en Irak et en Corée du Nord monopolisent toutes les capacités de la population et de nos journalistes à se scandaliser.

Donc, le modus vivendi suivi par les deux quotidiens québécois est le même, c’est-à-dire : l’annonce de la nomination éventuelle, la publication de la nouvelle accompagnée d’un éditorial et d’une caricature.

Dans le traitement de cette nouvelle, nos deux quotidiens se sont limité à nous présenter les faits, les réactions des gouvernements canadien et américain à cette élection en plus de donner la parole à leurs éditorialistes. Quelques lignes seulement ont été consacrées à citer madame Najat Al-Hajjaji, la nouvelle présidente. Des commentaires d’ailleurs qui n’ont trait qu’aux difficultés qu’elle a rencontrées à se faire élire.

Ma curiosité n’est pas satisfaite!

Que pense-t-on de cette nomination chez les grandes puissances de notre planète? Nos grands hommes politiques ne se sont-ils pas prononcés? Où sont les commentaires des Jacques Chirac, Tony Blair, Vladimir Poutine, Luiz Inacio Lula da Silva de ce monde? Sont-ils tous réunis sous la même Omerta?

Comment se fait-il que nos deux médias n’aient pas obtenu de commentaires des organisations de défense des libertés fondamentales ? Ont-ils oublié de monter aux barricades ?

De plus, la nouvelle présidente, Madame Najat Al-Hajjaji, comment voit-elle son mandat? Quelle attitude entend-elle prendre? Nous la faire connaître, il me semble que cela n’aurait pas été inutile.

L’hypothèse que j’ai avancée précédemment est peut-être la justification à cette couverture rachitique. Les menaces de guerre en Irak et en Corée du Nord monopolisent toute l’attention et de la population et de nos journalistes.

Bibliographie
Le Devoir, 20 janvier 2003 « L’injure libyenne », Serge Truffaut ;

Le Devoir, 21 janvier 2003 « La Libye présidera la Commission des droits de l’Homme de l’ONU », Reuters ;

Le Devoir, 21 janvier 2003 « Kadhafi nommé président de la commission des droits de la personne », caricature de Garnotte ;

La Presse, 16 janvier 2003 « Présidence de la Commission des droits de la personne, Ottawa s’oppose au choix de la Libye », Gilles Toupin ;

La Presse, 20 janvier 2003 « Les États-Unis très déçus de l’élection de la Libye à la présidence de la Commission des droits de l‘Homme », Richard Waddington, Reuters ;

La Presse, 21 janvier 2003 « Le Canada préoccupé par l’élection de la Libye à la présidence de la Commission des droits de la personne », Gilles Toupin ;

La Presse, 21 janvier 2003 « Les droits Libyens », Mario Roy ;

La Presse, 21 janvier 2003 « La Libye élue à la présidence de la Commission des droits de l‘Homme de l’ONU », caricature de Serge Chapleau ;